À propos de cette édition

Éditeur
Solaris
Genre
Science-fiction
Longueur
Novelette
Paru dans
Solaris 98
Pagination
27-34
Lieu
Hull
Année de parution
1991
Support
Papier

Résumé/Sommaire

Sur une planète qui pourrait bien être la Terre, une catastrophe a entraîné la dévastation de la biosphère et la métamorphose d’une race intelligente en bêtes dont l’intellect rudimentaire est soumis aux besoins primaires de l’alimentation, de la procréation et de la survie de l’espèce. Une mission d’exploration venue d’outre-espace a découvert ce monde baptisé A’t, qui signifie « peur/danger » dans la langue de ces A’tiens. Les A’tiens vivent en symbiose avec des picobes ou picophages et, ensemble, ils formeraient une entité consciente qui englobe toute la planète. Les explorateurs phlézites finissent par repartir avec une poignée d’A’tiens captifs, qui permettront à l’entité A’t d’assurer sa survie en transcendant la planète qui lui sert de soutien et qui se refroidit.

Commentaires

J’ai été imperméable au charme ou à la vision de cette nouvelle dont la longueur imposante n’est faite que d’une alternance d’exposés, teintés d’un léger humour qui ne rachète rien, et de descriptions de la vie quotidienne des A’tiens. Quelques passages remarquables, surtout vers la fin, se détachent de l’ensemble par une qualité lyrique de l’écriture, mais le tout reste d’une sécheresse – j’ai failli dire d’un ennui – de manuel ethnographique.

Les exposés phlézites constituant un rapport d’exploration trahissent une subjectivité et un aveuglement mis en relief par les scènes adoptant le point de vue d’A’tiens. La tension qui s’instaure entre les deux points de vue génère un certain amusement face aux travers si « humains » des Phlézites. Ce portrait du fonctionnement de l’analyse scientifique et cette présence d’une entité planétaire à base de « particules » inédites rappellent immanquablement le roman Solaris de Lem, le brio en moins. Cependant, on pourrait tout aussi bien évoquer l’hypothèse de Gaia ainsi qu’une multitude d’œuvres antécédentes dont Blood Music de Bear serait l’avatar le plus récent.

Cependant, abstraction faite des plates longueurs du texte, ce sont les incohérences et les contradictions de l’histoire qui en minent véritablement la portée. De nombreux éléments sont invraisemblables : une radioactivité planétaire décelable à des années-lumière de là, un écosystème où l’érosion n’agit plus et qui est réduit à deux espèces, une teneur en oxygène de l’atmosphère qui ne se ressent pas de la disparition de toute végétation… Les picobes servent de deus ex machina, mais ni leur origine ni leur nature, qui frôle le vitalisme, ne sont expliquées. De graves contradictions subsistent : d’une page à l’autre, on apprend que la chair des A’tiens, pourtant « littéralement composés » de picobes, peut être apprêtée et débarrassée de picobes. Le dernier paragraphe de la nouvelle suggère qu’il existe ailleurs bien des consciences planétaires, que l’on suppose associées à des picobes, alors que les explorateurs qui ont détecté avec une facilité déconcertante les picobes d’A’t n’en ont jamais trouvées ailleurs.

Somme toute, la nouvelle d’Harold Côté est ambitieuse, mais elle souffre de longueurs et de plus d’un accroc dans sa mise en scène. L’idée de base n’est pas neuve, mais la présentation de celle-ci fait preuve d’une originalité certaine. [JLT]

  • Source : L'ASFFQ 1991, Le Passeur, p. 64-65.