À propos de cette édition

Éditeur
Pierre Tisseyre
Titre et numéro de la collection
Chacal - 6
Genre
Science-fiction
Longueur
Roman
Format
Livre
Pagination
257
Lieu
Saint-Laurent
Année de parution
1998
ISBN
9782890517059
Support
Papier

Résumé/Sommaire

La jeune Nadia est au nombre des naufragés spatiaux dont l’astronef s’est fracassé sur un astéroïde inconnu. La vie des survivants s’est organisée à l’intérieur du module restant, mais ils cultivent aussi une mousse nutritive spéciale sous un dôme installé sur l’astéroïde même.

Un jour, Nadia repère sur le radar un objet qui se dirige vers eux. Il apparaît bientôt qu’il ne peut s’agir d’un corps naturel, même s’il ne s’agit pas non plus de la navette de secours que tous espèrent. Car l’astéroïde les a emportés bien loin du lieu de l’accident et nul ne sait où ils se trouvent dans l’immensité entre Mars et Jupiter. Ni quand ils pourront être secourus…

La vie quotidienne de ces onze hommes, quatre femmes et d’une adolescente est donc dominée par l’incertitude, à laquelle se greffe la tension résultant de l’inactivité et de la promiscuité. Le déséquilibre numérique entre hommes et femmes fait de Nadia la cible de plusieurs regards masculins, mais celle-ci balance entre l’envie de connaître une première expérience sexuelle et l’indifférence due au peu d’attrait des partenaires potentiels.

Cependant, elle apprend peu à peu à voler de ses propres ailes. Comme elle s’occupe de récolter les mousses nutritives, elle découvre une mutation inattendue. Elle apprend aussi à discerner la véritable personnalité de ceux qui l’entourent. Puis, quand il faut intercepter l’objet à la dérive, elle part à la rescousse du pilote Moustapha. Enfin, lorsque les naufragés découvrent que l’objet en question est une sonde munie d’une voile solaire, elle se porte volontaire pour partir à bord à destination des colonies de Jupiter. Son odyssée solitaire sera couronnée de succès, ses compagnons seront sauvés et elle rencontrera son premier amour autour de Jupiter avant d’aller étudier au centre Arthur C. Clarke.

Commentaires

Jean-François Somain est un écrivain de science-fiction aguerri et cela se voit. Il ne commet pas les erreurs flagrantes d’auteurs pour jeunes comme Marie Décary ou Jacques Lazure, il se tient au courant des développements possibles de l’exploration spatiale et de la technologie du futur, et il préfère imaginer un avenir peuplé d’humains ordinaires plutôt que de monstres ou de super-héros. Par son réalisme et sa conformité à nos connaissances actuelles, ce roman se rattache plutôt à des œuvres comme Les Mirages du vide de Bernard Chapleau et L’Odyssée du Pénélope de Jean-Pierre Guillet.

En aboutissant sur un astéroïde inconnu bientôt baptisé Domino, le vaisseau d’exploitation minière Delta recrée le lieu commun littéraire de l’île déserte… déserte jusqu’à l’arrivée de naufragés. Conformément aux conventions du genre, l’intérêt du lecteur se portera donc sur les efforts pour organiser la survie matérielle, sur la gestion des rapports entre les rescapés et sur les possibilités de délivrance.

Cependant, l’auteur rend si bien l’isolement de ses personnages et l’ennui qui les guette que la narration traîne en longueur. L’action met un certain temps à démarrer et les personnages ne retiennent pas tous l’attention. À bien des égards, les compagnons de Nadia sont des personnages de téléroman, souvent réduits à des problèmes ou traits de caractère simplistes, formulant volontiers des platitudes et des évidences typiques des téléromans.

Il y a donc le pilote qui se morfond de n’avoir pu sauver le Delta, le beau jeune homosexuel sympathique mais inaccessible, le vieux héros taciturne au cœur d’or, le technicien vieillissant qui refuse d’admettre ses défaillances, le jeune séducteur imbu de lui-même… En fin de compte, ce sont les personnages féminins qui échappent le plus facilement aux stéréotypes.

Si Nadia est agacée par les assiduités de Patrick, elle apparaît en fait comme une jeune femme qui se cherche, en quête d’amour oui, mais qui est aussi curieuse d’en apprendre plus sur les adultes qu’elle côtoie, et désireuse d’être reconnue par eux comme leur égale. C’est ce qui la rend sympathique et c’est elle qui tient le roman à bout de bras. En fin de compte, c’est l’histoire d’une étape dans le mûrissement d’une jeune fille, et la science-fiction n’est là que pour mettre un peu de piquant dans le décor.

D’ailleurs, Jean-François Somain ne retient du décor que ce qui l’arrange. Des pilotes et voyageurs expérimentés pourraient-ils si mal connaître les rudiments de l’astronautique, au point d’ignorer tout du repérage aux étoiles ? Avec tout le matériel qu’ils ont gardé, seraient-ils vraiment incapables de bricoler une radio pour appeler à l’aide ? Ils ont déjà un radar, appareil qui n’est pas autre chose qu’un émetteur radio…

À l’occasion, Somain trahit aussi une fort curieuse conception des voiles solaires, mais il se montre assez bien informé pour qu’on le lui pardonne. Par contre, la densité d’astéroïdes qu’il décrit dans le voisinage de Domino est tout à fait invraisemblable, tout comme l’est l’existence même d’un astéroïde de cette taille non répertorié.

En dépit de ces erreurs d’importance secondaire, il faut saluer l’effort de signer une œuvre de science-fiction moderne, même si on regrettera que cette science-fiction soit réduite à un vernis plaqué sur une intrigue plus ou moins intéressante. [JLT]

  • Source : L'ASFFQ 1998, Alire, p. 161-162.

Références

  • Spehner, Laurine, Lurelu, vol. 21, n˚ 3, p. 40.