À propos de cette édition

Éditeur
Pierre Tisseyre
Genre
Fantastique
Longueur
Novella
Format
Livre
Pagination
157
Lieu
Montréal
Année de parution
1985
Support
Papier

Résumé/Sommaire

Il s'appelle Jean-François. Il a sept ans, son corps dix-sept. Voilà dix ans qu'un enfant blessé par le départ de son père murit son projet. Il n'a pas pardonné. Il lui faut tuer son père, sinon il aura toujours sept ans. Dès le premier jour, il a senti un processus s'enclencher en lui. Il abrite l'Assembleur, insensible et glacé. Jean-François étudie l'informatique au cégep. Patiemment, il a monté un programme qui accomplira sa vengeance. Et celle de sa mère. Ils pourront suivre le déroulement des opérations sur l'écran cathodique. Car l'exécution sera longue. Il faut que le père de Jean-François sache.

Commentaires

Ce qui précède n'est pas à proprement parler un résumé du roman mais plutôt un condensé du prologue, là où l'auteure pose avec force les bases du drame qui va se jouer devant nous. Je dis avec force car Aude, alias Claudette Charbonneau-Tissot, écrit avec une lame de rasoir. Les phrases sont courtes, incisives, percutantes. Pas un mot n'est superflu ; nous sommes à l'opposé de l'écriture mélodramatique. Les paragraphes sont courts, bien séparés. Là encore, la volonté de concision et de force apparaît pleinement. L'auteur groupe, associe, met en évidence, impose son rythme au lecteur. Les images saisissantes se suivent à un rythme effréné, se bousculent, nous bousculent.

L'Assembleur, récit d'une famille éclatée, présente les points de vue de la mère, du père, de l'enfant. Tour à tour victimes, puis bourreaux, chacun expose son point de vue sur la situation désastreuse et les torts subis. À tous moments, le lecteur se rappelle le petit texte placé en exergue qui éclaire de sa lumière humaniste le roman : Mon père disait : « Il n'y a pas d'êtres méchants, il n'y a que des êtres souffrants. »

Le plan du roman est simple : Jean-François explique son projet dans un premier temps, Alexandre le père commence à subir le supplice programmé dans la deuxième partie, Érika la mère expose ses griefs tout en endossant la vengeance de son fils, Alexandre revient, plus critique envers lui-même, subissant toujours la vengeance, Érika entre à nouveau en scène, plus vindicative que jamais, et enfin Jean-François réapparaît dans la dernière partie - qui ne contient que deux phrases - pour annoncer sa victoire.

L'idée d'une vengeance par ordinateur fait tout de suite penser à la SF, mais c'est plutôt au Fantastique que se rattache L'Assembleur puisqu'à aucun moment une tentative d'explication n'est apportée. Comment l'Assembleur s'y prend pour créer cette suite de fantasmes dans l'esprit de son père n'est d'ailleurs - et heureusement - pas le plus grand des soucis de l'auteure, qui aurait tout aussi bien pu remplacer l'électronique par le vaudou où tout autre élément donnant un semblant de véracité à la situation.

Roman fantastique, donc, L'Assembleur, de par le traitement original, dur et explosif d'un thème trop souvent mal exploité, est une belle réussite. Grâce à la maîtrise parfaite de son écriture, Aude réussit à entraîner le lecteur dans une réflexion incisive sur l'éprouvante réalité des familles éclatées, sur le mal irrémédiable que se sont faits - souvent sans le vouloir, sous les pressions d'une société impersonnelle, immature - des êtres qui se sont aimés et qui s'aiment encore.

Le gouffre entre l'amour et la haine est sans fond. Mais il est si étroit qu'un tout petit saut… [JPw]

  • Source : L'ASFFQ 1985, Le Passeur, p. 18-19.

Références

  • Janelle, Claude, Solaris 67, p. 13-14.
  • Lord, Michel, Dictionnaire des oeuvres littéraires du Québec VII, p. 52-53.
  • Parizeau, Alice, La Presse, 09-06-1986, p. B 4.