À propos de cette édition

Éditeur
XYZ
Genre
Fantastique
Longueur
Nouvelle
Paru dans
XYZ 45
Pagination
34-37
Lieu
Montréal
Année de parution
1996
Support
Papier

Résumé/Sommaire

Chaque année, afin de célébrer en grand l’anniversaire de sa compagne, « il » prépare une surprise. Et serine, durant les quelques mois précédant l’événement, un « Attends voir ! » excité, fébrile, qui promet un étonnement total. De son côté, « elle », chaque année, se prête au jeu. Or cette fois, monsieur semble s’être surpassé. Mais quel objet ce monceau de pièces à assembler faites d’un « bizarre matériau » – un métal quelconque, à l’évidence –, ces courroies, ces « lumières multicolores » et ces « deux petits moteurs » peuvent-ils bien dissimuler ?

Commentaires

La – mauvaise – surprise, c’est d’abord notre héros qui l’aura. Soit il n’a pas compris que l’objet se présentait en pièces détachées, soit le colis livré en ce jeudi fatidique n’est pas le bon. Reste qu’un malaise l’avait gagné dès la vue de cette « large et longue boîte de carton renforcé » franchement disproportionnée étant donné le contenu attendu. Malaise, puis irritation devant la tâche d’assemblage à exécuter et enfin, perplexité devant le résultat : la situation est somme toute banale. Le mystère instillé par le nouvellier quant à la nature du fameux colis, un climat de sourde inquiétude ainsi que « l’ultime et non moins stupéfiante directive » à laquelle obéit notre bricoleur en herbe laissent toutefois craindre un dénouement peu heureux. Et de fait…

Bon, l’homme meurt à la fin. À cause de sa maladresse, puisque l’assemblage de l’objet requérait la manipulation d’outils contondants ? C’est l’une des explications réalistes possibles, que Normand de Bellefeuille se garde bien de donner. Rien n’est d’ailleurs explicité ni très précisé, pas même l’événement célébré : on présume qu’il s’agit d’un anniversaire. Au contraire, le nouvellier cultive avec délectation l’ambiguïté, comme en témoigne au premier chef le champ sémantique exploité, et il revient au lecteur d’imaginer les « réponses » à partir d’éléments subtils, dont bien sûr les composants du très énigmatique cadeau que le protagoniste voulait offrir à sa douce.

De Bellefeuille appartient à la catégorie des écrivains que l’on peut qualifier de formalistes, et l’épithète ne saurait sûrement pas être démentie ici. Dans ce réjouissant exercice de style que constitue « “Attends voir !” », l’effet fantastique est créé grâce à la virtuosité langagière, au non-dit et au ton distancié. L’anecdote est minimaliste. Par surcroît, les deux personnages ne sont jamais identifiés autrement que par un pronom, ce qui ajoute encore au flou du récit. L’homme meurt à la fin, aucun doute là-dessus. Mais c’est bien là l’unique certitude que nous autorise le très ludique et habile Normand de Bellefeuille. [FB]

  • Source : L'ASFFQ 1996, Alire, p. 69-70.