À propos de cette édition

Éditeur
Héritage
Titre et numéro de la série
Neubourg et Granverger - 10
Titre et numéro de la collection
Échos
Genre
Fantastique
Longueur
Roman
Format
Livre
Pagination
363
Lieu
Saint-Lambert
Année de parution
1991
ISBN
9782762568585
Support
Papier

Résumé/Sommaire

1944. Le monde est en guerre. La mère de Maxime Michay-Argenson est emprisonnée pour avoir participé à une manifestation contre la conscription. Maxime doit aller habiter chez les Davard, dans le domaine de Granverger, où il retrouve son ami Virgile Davard. Celui-ci l’informe des choses étranges qui se passent autour du manoir, dont les mystérieux cercles tracés sur le gazon.

Par ailleurs, le professeur Bertin a trouvé le moyen de communiquer avec les morts à l’aide d’un appareil bizarre. Il fait des “séances” en compagnie d’une vieille dame. Celle-ci emmène un jour Victor Usereau, archéologue et historien, à l’une de ces séances. Ils entendent les voix. Usereau reconnaît une langue : l’araméen. Il établit un contact avec Phalazar qui a vécu à Khaleb. Usereau et Phalazar parlent d’un certain “Cercle de Khaleb”. Peu après, Bertin se fait cambrioler et l’appareil qui permet de parler aux morts disparaît.

Lors d’une exploration de la cave du manoir, Maxime et Virgile réalisent que la partie située sous la salle de bal est scellée et qu’on a même tenté d’en dissimuler l’existence. Un soir d’automne qu’il est seul dehors à observer l’étang, Maxime voit un animal inquiétant sortir de l’eau. Quelque temps plus tard, le vieux Zéphirin, raconteur du village, affirme avoir vu la bête du ruisseau qui, la nuit, sort de l’eau en se traînant sur le ventre.

Grâce à un trousseau de clés trouvé au grenier, les deux jeunes amis ont accès à toutes les pièces du manoir, et même au tombeau des Davard que Maxime va explorer. Dans la crypte, au fond d’une niche, une crevasse dans la paroi a été solidement murée. Au cours de leurs recherches, ils vont dans un souterrain qui mène à la tour qu’habite Wilson le jardinier. Ils y découvrent des livres signés Hyacinthe Frévic ainsi qu’une lettre adressée à Paul Frévic. Paul Wilson serait-il Paul Frévic ?

Le printemps venu, les mystères s’accumulent et se précisent. Maxime aperçoit d’abord un nouveau cercle sur le gazon, au même endroit que les autres, puis il espionne une séance au moulin avec madame Emery et Usereau. Cette fois, il discerne quelqu’un tout au fond, immobile, couché sur un lit de camp.

Une autre nuit, Maxime et son copain entendent des coups de pics. Ils découvrent bientôt une excavation au fond de laquelle travaille Wilson, ainsi que le dalot qui lui sert à évacuer la pierraille. Ils en profitent pour fouiller. Quelques livres trouvés leur apprennent l’histoire du Cercle de Khaleb et de ses pouvoirs.

Une nouvelle confrontation avec la bête convainc Maxime que celle-ci veut communiquer. De son côté, Virgile conclut qu’il y a un vaste souterrain entre le manoir, la tour et le cimetière. Maxime profite de l’absence de Wilson pour s’introduire dans l’excavation de ce dernier. Tout au fond, par une mince fissure, il devine une vaste caverne.

Maxime va examiner à nouveau la faille de la crypte pour voir si elle ne mène pas à une énorme grotte elle aussi. Il débouche alors dans une caverne jonchée de squelettes. Soudain, un bruit. Quelqu’un vient. Mais Maxime a déjà trouvé le Cercle…

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Commentaires

Le Cercle de Khaleb est certes une suite au Cercle violet, mais c’est une suite inattendue. Si le lecteur, attiré par la parenté des titres, s’imagine y trouver les nouveaux avatars de l’épée Arhapal, il sera sans doute déçu. (On se souviendra en effet qu’à la fin du Cercle violet, l’épée enchantée avait été récupérée par le libraire Jussiave). Mais à la lecture du nouveau roman de Sernine, le même lecteur devra reconnaître que l’intrigue est directement liée aux dernières scènes du Cercle violet. En effet, le roman nous révèle le sort des membres du sinistre Cercle mauve, association dont, on s’en rappelle, le destin avait apparemment été scellé en 1899, lors du tremblement de terre qui avait enseveli leur repaire secret, vaste caverne située sous le domaine de Granverger. À cela s’ajoute un petit détail qui n’avait pas été mentionné dans le précédent roman, un bijou qui a pour nom “le Cercle de Khaleb”.

(Pour rassurer tout de suite les inquiets qui n’auraient pas encore lu le livre : non, Daniel Sernine n’a pas essayé d’attirer le public d’Arlette Cousture avec son titre. Khaleb a vraiment existé, existe toujours, mais sous un autre nom. Il s’agit de la ville d’Alep.)

Il est difficile de résister à un roman qui commence par ces mots : « Quand on écoute attentivement, dit l’homme aux longues oreilles, on peut entendre parler les morts. » Cette phrase aux accents barkeriens, métaphore délicieuse et un peu trompeuse, qui acquerra avec le temps une saveur bien différente, cette phrase est un excellent exemple du jeu auquel s’est livré Daniel Sernine tout au long de son roman.

Celui-ci en effet n’est pas étranger au roman policier à problème, au whodunit comme on dit dans le monde anglo-saxon. Comme dans un roman classique, les faits nous sont présentés de telle sorte qu’ils ne suggèrent d’abord aucune cohérence. Ce n’est qu’à la lecture qu’on distingue peu à peu les réalités derrière les apparences, qu’on réinterprète ce qui semblait connu pour enfin découvrir les faits réels. Comme la phrase du début, le sens des choses n’est pas celui qu’on imaginait tout d’abord. Le roman fonctionne comme un gigantesque rébus à la réponse surprenante.

Puisqu’on parle d’apparences trompeuses, signalons que l’illustration de couverture, signée Peter Pusztaï, si elle n’est pas mauvaise en soi, a cependant le défaut majeur de vendre la mèche sur l’apparence de la créature, et de gauchir la vérité en illustrant une scène inexistante (la créature est beaucoup plus petite que représentée et serait bien incapable du saut que lui attribue l’artiste). On pourra aussi juger que les couleurs rendent mal le climat du roman. Un mauvais point pour l’illustrateur et l’éditeur !

Mais une simple structuration de roman policier classique ne suffirait sans doute pas à un roman fantastique. Nous avons aussi affaire à un roman d’aventures. Il n’est pas difficile, pour peu qu’on s’en donne la peine, de se remettre dans la peau du jeune qu’on a été et de frissonner à nouveau à l’évocation des souvenirs anciens de nos explorations d’enfant. Sernine le sait bien qui invite le jeune lecteur (et le moins jeune) à une série d’explorations de tunnels, de caveaux, de passages secrets et d’autres lieux de ténèbres et de mystères, prégnants de délicieuses terreurs. L’intérêt du lecteur est sans cesse titillé par des petits mystères savamment éparpillés. Grâce au tissu serré de l’intrigue, les temps morts sont réduits à leur minimum. On se croit suffisamment, en tant que lecteur, dans la peau d’un jeune pour s’y plonger totalement et partager les émotions de Maxime. En ce sens, tout “marche” très bien et on oublie qu’on est en train de lire une histoire pour jeunes, ce qui est un exploit en soi.

Détail original (bien que le monde scientifique ait déjà fait son apparition dans La Nef dans les nuages) : une sorte de justification scientifique apparaît dans le cycle de Neubourg/Granverger. Car c’est ainsi qu’il convient de comprendre l’utilisation de l’appareillage qui rend possible le contact avec les morts. Certains y verront un affaiblissement de la matière fantastique. Pour d’autres, l’introduction d’une donnée pseudo-scientifique rendra le fantastique plus près de la vie et plus crédible, pour tout dire, plus grotesque.

Autre excellent point : la résolution du dilemme moral de Virgile qui, accablé par l’asthme et condamné à une vie étriquée, est confronté à un choix difficile entre la guérison par les fabuleux pouvoirs du “cercle” ou la tristesse de sa condition présente.

Le roman n’est pas parfait ; aucun roman ne l’est. On pourrait lui reprocher quelques mièvreries, une complication excessive de l’action qui ne va pas à l’occasion sans une certaine obscurité (qui est qui ?) surtout dans le premier quart du roman, et il se peut que certains lecteurs ne trouvent pas de justification suffisante à une narration faite au présent de l’indicatif. De plus, il n’est pas évident que des adolescents trouvent grand plaisir à lire de la poésie dans un roman d’aventures, fût-elle issue des plus grandes plumes et, à plus forte raison, si elle ne l’est pas. (Nous parlons ici des œuvres poétiques de M. Narbonne, le professeur des deux garçons.) Pour rester dans le même ordre d’idées, on peut aussi se demander si le personnage de Narbonne n’aurait pas acquis plus d’épaisseur si on avait retranché du scénario ses mystérieuses incantations et l’explication plutôt décevante qui en est donnée. Un mystère lui suffisait – celui de son récent passé. Deux, c’est un de trop. On pourra aussi juger le personnage un peu trop propre. Il n’a pas de défauts ; même son “erreur” était noble.

Mais c’est là affaire de goût, peut-être. Ce qui a davantage déçu le plus âgé des soussignés, c’est l’explication de l’apparence de la bête. Ou plutôt l’absence d’explication valable. Mettons-nous à la place du lecteur : tout au long du roman, Sernine nous la décrit peu à peu, avec une avarice de détails qui excite autant qu’elle frustre (mais plaisamment). Quand la preuve nous est faite de l’apparence paradoxale de la bête, et quand les explications peuvent enfin venir, l’auteur se contente de nous dire qu’on ne saura sans doute jamais comment le père de Frévic a pu adopter cette forme composite. S’agit-il d’une omission volontaire destinée à une hypothétique suite ? L’idée d’une suite ravira sans doute tout le monde, mais…

Broutilles ? Peut-être. Chose certaine, Daniel Sernine a produit avec Le Cercle de Khaleb un élément capital du grand cycle historico-fantastique qu’il construit depuis des années. C’est peut-être aussi le plus réussi.

La logique de la série voudrait que l’action du prochain roman se déroule à notre époque. Que devient l’épée Arhapal, M. Sernine ? [CB/GS]

  • Source : L'ASFFQ 1991, Le Passeur, p. 156-159.

Prix et mentions

Grand Prix de la science-fiction et du fantastique québécois 1992

Références

  • Anctil, Mélissa, imagine… 59, p. 129.
  • Blanchard, Louise, Le Journal de Montréal, 15-02-1992, p. W-12.
  • Gauthier, Christiane, Des livres et des jeunes 43, p. 50.
  • Laflèche, Alain, Vidéo-Presse, vol. XXI, n˚ 10, p. 41.
  • Madore, Édith, Les 100 livres québécois pour la jeunesse qu'il faut lire, Québec, Nota bene, p. 133-135.
  • Martel, Julie, Solaris 98, p. 60-61.
  • Perrault, Michèle, Lurelu, vol. 15, n˚ 1, p. 20-21.
  • Sarfati, Sonia, La Presse, 05-01-1992, p. C 3.
  • Trudel, Jean-Louis, Samizdat 21, p. 34-35.