À propos de cette édition

Éditeur
Le Devoir
Genre
Fantastique
Longueur
Courte nouvelle
Paru dans
Le Devoir, vol. LVI, n˚ 82
Pagination
20
Lieu
Montréal
Date de parution
08 avril 1965

Résumé/Sommaire

Dans la chambre nuptiale, la jeune mariée se dévêt doucement, elle se regarde dans le miroir, voit l’anneau qu’elle a enlevé et posé sur la table, le prend dans sa main, constate qu’il est soudain terni, égratigné, et quand elle le passe à son doigt, ce dernier est noueux, bruni, ridé comme un vieux cuir…

Commentaires

L’année précédente avait vu la publication du recueil de courts textes, Jolis Deuils, du jeune auteur. Or, cette « Chambre nuptiale » aurait pu y figurer puisque la forme et la manière sont les mêmes. Avec une belle maîtrise, Roch Carrier donne de la concision à ses phrases, de la rigueur à sa gradation narrative, ce qui lui permet de mettre en place très rapidement une ambiance de recueillement et de solennité qui a tout à voir avec l’étape charnière que représente, pour une jeune mariée, le mariage. Puis c’est le basculement soudain de la réalité ; le télescopage du temps amène le lecteur à la chute, brutale, au hurlement de l’épouse devant sa vie écoulée en un instant, devant sa vieillesse si vite survenue.

Et c’est ça, la force du fantastique – et, ici, celle de Carrier –, cette possibilité de bafouer la réalité et, dans le cas qui nous occupe, de télescoper en quelques lignes le temps d’une vie. Dès lors, les pensées que les lecteurs ne peuvent pas ne pas avoir eues une fois dans leur existence – la jeunesse n’est pas éternelle, le mariage est une étape importante de la vie, le temps passe si vite… – et qui, en temps normal, ne sont que préoccupations banales et ne portent guère à conséquence, prennent soudain tout leur sens, acquièrent une richesse et une pertinence insoupçonnées… Du fantastique comme outil de prise de conscience, en quelque sorte !

Un texte bref d’une grande force, beau comme la vie qui passe. [JPw]

  • Source : La Décennie charnière (1960-1969), Alire, p. 28-29.