À propos de cette édition

Éditeur
Les Publications Ianus
Genre
Science-fiction
Longueur
Nouvelle
Paru dans
Orbite d'approche – 1
Pagination
61-77
Lieu
Montréal
Année de parution
1992
Support
Papier

Résumé/Sommaire

Lucas est le gardien du phalanstère AR-15, une cité des Arts habitée par des artistes en tout genre. En se réveillant un matin, il découvre que l’ordinateur central de la cité ne répond plus et que la ville s’est mise en déplacement. Ne trouvant aucune cause logique à ces dérèglements, Lucas porte ses soupçons sur Gerhardt, holographiste qui a une formation en électronique, et sur Veren, nomade doté de connaissances plus étendues que la moyenne. Mais il détermine d’abord que les réserves de sel de la ville ont disparu, puis que Gerhardt a lui aussi disparu et que ses quartiers recèlent des statues fabriquées par une peuplade primitive des environs, friande de sel. Constatant son impuissance, Lucas abandonne la cité des Arts, laissant les experts venir régler la situation car un virus informatique ravage l’ordinateur. Quelques mois plus tard, alors qu’il est devenu technicien d’astronomie dans une cité des Sciences, Lucas revoit Veren qui lui apprend le fin mot de l’histoire.

Commentaires

De tous les textes sortis de la plume de Vaillancourt que j’ai lus jusqu’à maintenant, c’est sans conteste le meilleur. Le décor est fort rigoureux. Ces villes mécanisées et mobiles rappellent celles de Christopher Priest ou Greg Bear. Le personnage de Lucas est bien campé et sympathique, avec son sens des responsabilités, son goût des machines et sa perplexité face à la psychologie du phalanstère d’artistes dont il est le concierge et le gardien. Le nomade Veren, aux larges vues formées par ses errances, est tout aussi attirant. Les artistes, pour une fois, n’ont pas le beau rôle, l’auteur caricaturant gentiment leur égocentrisme, leur repliement sur eux-mêmes, leur mépris d’autrui, leur incapacité face aux machines dont ils dépendent, leur talent pour l’art abscons et quelques autres travers. D’ailleurs, ironiquement, les rudimentaires statuettes de pierre produites par les primitifs Kwyndis tentent Gerhardt au point de l’amener à commettre un crime.

La construction de la nouvelle laisse cependant un peu à désirer. Si l’énigme posée par les problèmes de la cité des Arts devait en être le propos central, elle est résolue de façon insatisfaisante, au moyen d’un gros paragraphe d’explications plaqué à la fin. Si le changement d’âme devait en constituer le cœur, il n’est pas très bien amené, car on pouvait retirer une tout autre impression de la personnalité de Lucas.

La langue de Vaillancourt vogue entre Rabelais et San Antonio, mais sur un mode plus poétique. Certains des mots employés sont inusités, apparemment inventés pour la circonstance, ce qui prête au texte une belle saveur surréaliste. Toutefois, il y a au moins une faute d’orthographe avérée, là où « les longues heures de pose » des astrographes sont devenues de « longues heures de pause », ce qui porte à croire que certaines de ces trouvailles pourraient être involontaires.

Il s’agit donc d’un excellent texte de science-fiction, à la fois par la langue et par la cohérence du monde mis en place. L’auteur propose une énigme rigoureuse que Lucas réussira presque à résoudre. Si la conclusion semble un peu bâclée, elle conserve néanmoins une force d’évocation étonnante. [JLT]

  • Source : L'ASFFQ 1992, Alire, p. 192-193.