À propos de cette édition

Langue
Français
Éditeur
imagine…
Genre
Science-fiction
Longueur
Nouvelle
Paru dans
imagine… 46
Pagination
155-176
Lieu
Montréal
Année de parution
1989
Support
Papier

Résumé/Sommaire

Une petite fille de sept ans, Nathany, vit dans une cité sous dôme, Cyblande. Les éducateurs lui apprennent à se servir de son syn et de ses cybes, ceux-ci étant des modules cybernétiques qui remplacent les sens. Cu­rieuse de nature et précoce, Nathany tente des expériences en reconfigurant ses cybes. Que découvrira-t-elle ?

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Commentaires

Il fait plaisir de renouer avec la production d’Élisabeth Vonarburg, plutôt rare ces dernières années. Aucun texte inédit publié en 1988, seule­ment deux en 1987. Elle nous revient en force avec « Cogito », titre qui constitue en soi un programme auquel nous convient ses œuvres. Les réflexions que suscite son dernier texte tournent autour du rapport qu’en­tretient l’être humain avec son corps et son environnement. Question fondamentale qui peut remettre en cause le principe même de la réalité.

Ce qui est réjouissant dans ce texte, c’est le souci de l’auteure de bien expliquer les termes et les concepts : le syn (unité de contrôle et de synthèse sensorielle), les cybes, les modeps (mode perceptuel), les percepts (per­ceptions) et la zeppe (zone perceptuelle) individuelle et collective. On comprend très bien les explications qu’elle donne, grâce notamment à des exemples clairs, ce qui n’était pas toujours le cas dans les textes du cycle du pont du froid.

La thématique de « Cogito »rappelle « Les Virus ambiance » d’Agnès Guitard. L’une et l’autre écrivaine explorent l’importance des compor­tements et des conditionnements. Même dans une société fondée sur l’individualisme le plus rigoureux, il faut qu’il y ait des limites et des codes pour être capable de fonctionner, ce qui oblige à certains compromis. La question de l’apprentissage, qui est une forme de conditionnement, et celle de l’exercice de la liberté individuelle se posent inévitablement. Faites con­fiance à l’auteure, elle formule brillamment les enjeux.

Elle résume très bien aussi le projet des fondateurs de Cyblande : faire mieux que la nature. Ceux-ci ont choisi la voie de la biocybernétique tandis que ceux qui sont restés sur la Terre ont choisi la "nature". Aucun jugement de valeur ne sera porté sur ce choix, même pas par la narratrice – qu’on soupçonne être une Terrienne, mais qui est-ce ? L’auteure elle-même ? Nathany adulte ? C’est là une belle ambiguïté qu’entretient le récit.

Ma seule réserve concerne la fin qui me déçoit un peu. Il me semble que l’auteure, la conteuse d’histoire, a démissionné et a abandonné la fiction pour laisser la place au philosophe. L’histoire qui nous est racontée n’est qu’un prétexte finalement pour nous amener à une réflexion philosophique sur l’importance des sens. Sans la vue et l’ouïe, l’humain peut survivre. Mais sans les cinq sens ? J’aurais préféré une fin plus explicite qui nous aurait renseignés sur le sort de Nathany mais il faut convenir que cette fin ouverte, hautement métaphysique, s’accorde parfaitement avec les prolégo­mènes de la question et le ton didactique mais très vivant de la formulation du postulat.

« Cogito »est un très fort texte qui se classera sûrement parmi les meilleurs de l’année 1989 et qui s’inscrit très bien dans le numéro thématique d’imagine… sur les sciences et les technologies. [CJ]

  • Source : L'ASFFQ 1989, Le Passeur, p. 214-215.