À propos de cette édition

Résumé/Sommaire
Antonio, être couvert de poils, semblable à un animal pourvu de la capacité d’écrire, vit au trente-deuxième étage de la quatorzième section d’un édifice. Lorsqu’il n’écrit pas, il fait un tour de roue ou observe les va-et-vient des voisins. Mais son univers, ainsi que celui de tous les locataires à perpétuité de l’immeuble, se reconfigure, le bâtiment descendant d’un degré durant la nuit, devenant ainsi le trente-et-unième étage. Mis au banc des accusés, Antonio sent la folie se frayer lentement un passage en lui…
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Commentaires
Histoire vertigineuse et foisonnante, « Comment Antonio perdit la raison » n’est pas de ces textes qui se laissent aisément appréhender. L’auteur semble s’amuser à brouiller les pistes, notamment quant à l’identité d’Antonio, tantôt pourvu de quatre pattes, à l’instar d’un animal, tantôt doté de mains comme un humain. De plus, l’univers mis en scène, énigmatique à souhait, paraît relever d’un cadre plus vaste que celui de la nouvelle. Un univers à l’imaginaire fécond et imprévisible, comme le révèle cet extrait de la section titrée « L’autobus » : « un court-circuit s’était produit durant les déplacements des chambres, causé par un tournoiement inhabituel… les chambres avaient pénétré en grand nombre sur le territoire interdit où elles brûlaient maintenant » (p. 24).
L’inventivité est donc au rendez-vous dans ce récit conçu pour les lecteurs attentifs, qui se retrouveront plongés avec délectation à l’intérieur de rouages complexes, comme ceux des multiples mécaniques (ascenseur, autobus, roue…) mises en scène dans ce texte. L’écriture de Louis-Philippe Hébert laisse de surcroît transparaître ses talents de poète, même dans les passages à caractère horrifique : « en étirant ses yeux vers le haut de la fenêtre, l’observateur distinguait les sursauts des lèvres supérieures d’où s’échappait un mince filet de sang, qui caillait sur place, et les bouts de doigts qui s’agitaient en-dessous [sic], mais ne pouvait imaginer la nature exacte de leur occupation » (p. 15).
Bref, « Comment Antonio perdit la raison » est un texte qui gagne à être apprivoisé, tels ces rongeurs qui, nuit après nuit, activent la roue de leur cage métallique… [AG]
- Source : Les Années d'éclosion (1970-1978), Alire, p. 255-256.