À propos de cette édition

Éditeur
Maclean Hunter
Genre
Science-fiction
Longueur
Nouvelle
Paru dans
Châtelaine, vol. VI, n˚ 4
Pagination
28-29 ; 92-94 ; 96
Lieu
Montréal
Année de parution
1965

Résumé/Sommaire

En l’an 2001, le narrateur, prénommé Claude, un jeune Montréalais de vingt et un ans, est épris d’une charmante anglophone qui porte le doux nom de Paulette Macdonald. Mais voilà, à la suite de leur rencontre dans un atelier de langues où elle apprenait le français et lui l’anglais, Paulette a contracté une passion sans bornes pour Paris et la culture française du siècle dernier, des cubistes et surréalistes jusqu’à Brassens et Ferré. Notre narrateur, lui, ne rêve que d’excursions dans l’ionosphère, d’amours vénusiennes et de colonisation de Mars. Le passé lui pue au nez. Lorsque Paulette ne lui laisse plus aucun espoir, il songe à ce point de l’espace qui semble habité par des êtres géants composés d’antimatière et enracinés dans le sol de leur monde. Il ira faire l’amour à une géante afin d’avoir de beaux anti-enfants !

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Commentaires

Que l’an 2001 paraissait loin en 1965 ! On fréquenterait des Vénusiennes et on coloniserait Mars. Brassens, Ferré et Vigneault seraient des vieilleries presque sombrées dans l’oubli, et le barrage de la Manic serait devenu un musée d’art esquimau. À certains égards, Claude Jasmin tombe très juste, évoquant la télévision sur grand écran branchée sur satellite, l’avènement des téléphones sans fil et la disparition des tourne-disques. De fait, seules les technologies de l’information et de la communication au sens large ont rempli leurs promesses de l’époque. Ni les moteurs atomiques ni la fusion nucléaire n’ont répondu aux espoirs : du coup, pas de voyages spatiaux routiniers ou de navettes à bon marché entre Paris et Montréal comme dans cette nouvelle. La société des loisirs (Claude travaille de 11 à 4), les sports orbitaux ou la manipulation mécanique du cerveau se font également attendre. Et Jean-Paul II n’a pas grand-chose à voir avec le pape Jean XXIV, « chef spirituel à la page ».

Toutefois, Claude Jasmin se montre clairvoyant en imaginant un face-à-face entre une nostalgique et un partisan de la modernité, même s’il ne prévoit pas l’ampleur qu’allait prendre l’industrie de la nostalgie au tournant du siècle. Il faut regretter, cependant, que la nouvelle soit à peu près dépourvue d’intrigue ou de structure dramatique. L’auteur se contente de présenter la situation, non sans accumuler les digressions et les réflexions incongrues. Le dénouement, en faisant intervenir une nouvelle planète située on ne sait où, éclairée par une centaine d’astres-soleils clignotants et habitée par des géants philosophes de nature végétale, s’abîme dans le ridicule. La pirouette est non seulement désinvolte, mais elle manque aussi de panache.

Le texte révèle néanmoins un auteur raisonnablement bien informé des progrès qu’on pouvait attendre des décennies à venir. Comme il sied à une nouvelle parue dans Châtelaine, Jasmin agrémente son extrapolation du récit d’une relation amoureuse entre deux êtres trop différents pour rester ensemble. Le cadre, un peu court, empêche l’auteur d’en faire plus que des personnages vite schématisés, mais le tout est raconté avec un entrain et un sens de la fantaisie qui nous permettent, encore aujourd’hui, de lire cette nouvelle sans déplaisir. [JLT]

  • Source : La Décennie charnière (1960-1969), Alire, p. 106-108.