À propos de cette édition

Éditeur
Vents d'Ouest
Titre et numéro de la collection
Ado - 23
Genre
Fantastique
Longueur
Nouvelle
Paru dans
Petites Cruautés
Pagination
77-98
Lieu
Hull
Année de parution
1999
Support
Papier

Résumé/Sommaire

Carlos Panaloza et Rosalie Latulippe se rendent à la fête de l’Halloween de leur école, l’un déguisé en monstre hideux, l’autre en starlette. Au cours de la soirée, un jeune motocycliste fait une entrée remarquée dans la salle. L’inconnu invite Rosalie à danser pendant que les musiciens de l’orchestre jouent de façon de plus en plus débridée et répètent inlassablement une mélodie incantatoire. Carlos tente par tous les moyens de rompre l’ensorcellement qui s’est emparé des personnes présentes à la fête. À minuit, le diable s’apprête à emporter Rosalie sur sa moto mais Carlos s’agrippe à l’engin et l’empêche de s’envoler dans les airs. L’inconnu disparaît dans une fente rouge ouverte subitement dans le ciel.

Commentaires

« La Danse infernale » est une adaptation moderne de la légende de Rose Latulipe où la transposition permet une comparaison intéressante entre les idéologies de chaque époque. Des éléments fantastiques communs s’y retrouvent : la pleine lune, l’heure fatidique de minuit, l’irruption du diable sur un coursier et la fin somme toute heureuse. Pourtant, de grandes divergences sont présentes. Rose Latulippe outrepasse le Mardi gras et danse sur le mercredi des Cendres, d’où sa disgrâce pour avoir bafoué l’interdit religieux ; Rosalie, pour qui ces deux jours ne veulent plus dire grand-chose, danse à l’Halloween, fête extrêmement païenne, moment propice aux manifestations bizarres, si l’on en croit les « mauvais » films d’horreur.

Dans la version moderne, c’est son accompagnateur qui tente de la sauver en utilisant davantage des ruses et des attaques, alors que Rose, dans plusieurs versions du XIXe siècle, était sauvée par les prières d’une vieille et l’intervention d’un curé. Le cheval satanique de la légende est remplacé par une rutilante motocyclette volante et le superbe et inquiétant danseur de Rose devient un « obséquieux » « grand et mince jeune homme » en « pantalon étroit et veston noir sur un t-shirt blanc » avec « son regard, sans expression, toujours fuyant… » jusqu’à ce qu’il voit rouge, comme on dit.

L’histoire de Sylvain Meunier est bien écrite, mais elle perd son sens premier. Dans la légende traditionnelle, l’arrivée du diable est expliquée par l’irrespect des interdits religieux ; dans la version moderne, rien, outre la journée de la fête et l’heure fatidique, ne justifie l’arrivée du personnage fantastique, pas même la musique de l’orchestre qui ne devient diabolique qu’après l’irruption du diable, ni la danse de Rosalie qui n’est pas interdite, même si Carlos la trouve un peu trop exhibitionniste. C’est une belle histoire qui perd cependant tout son côté sacrilège et qui, de ce fait, ne peut avoir le même impact sur les lecteurs : l’inquiétude liée à des raisons religieuses est remplacée par des craintes sociales : musique « heavy », mauvaises influences des motocyclistes, crainte de la mère pour sa progéniture… La balade du véhicule motorisé dans les airs prête à rire : comme le dit l’auteur à la fin de l’histoire : « personne n’accepta de prendre son témoignage au sérieux. Lui-même [Carlos] en vint à se demander s’il n’avait pas rêvé. »

Il s’agit donc d’une histoire fantastique agréable qui bouleversera moins que la version originale ne l’a fait en son temps. [AL]

  • Source : L'ASFFQ 1999, Alire, p. 119-120.