À propos de cette édition

Éditeur
imagine…
Genre
Science-fiction
Longueur
Nouvelle
Paru dans
Décollages
Pagination
50-55
Lieu
Sainte-Foy
Année de parution
1994
Support
Papier

Résumé/Sommaire

Arnau, un barbare, comme on le qualifie, est de passage à Niguilert, État îlien futuriste. L’espace en est clôturé par un champ de force qui semble le protéger à la fois d’un ennemi mortel et de la pollution. Une rencontre entre Arnau et Ravijian, commissaire des affaires astridiennes et représentant d’une race semblant très à cheval sur l’étiquette et le protocole, met en présence deux mondes aux valeurs contraires qui s’affrontent à travers les deux protagonistes.

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Commentaires

Étant donné qu’« Esclaves du sable » ne compte qu’un début et une fin, le lecteur est immédiatement projeté dans une scène finale sibylline qui lui fait assister à la mort atroce d’Arnau dans un affrontement extrêmement violent (cadavres, chefs militaires crucifiés, terreur et folie). On peut en déduire bien des choses : par exemple qu’Arnau est une sorte de gladiateur (comme le titre semble le suggérer) venu d’un autre monde pour entraîner une armée et défendre Niguilert dans une guerre manifestement religieuse (si on en croit les nombreux symboles disséminés dans les images associées au texte de Champetier), sous la supervision attentive de Ravijian.

Le numéro hors-série de la revue imagine…, intitulé « Décollages », avait pour objectif d’unir le mot et l’image en créant un partenariat entre des écrivains et des illustrateurs : le dessinateur devait soumettre trois images à l’écrivain qui lui était assigné, et ce dernier devait s’inspirer des œuvres proposées pour écrire le début et la fin percutants d’un récit SF. Ainsi, Joël Champetier a accouché de la nouvelle « Esclaves du sable », inspiré par les illustrations cauchemardesques et torturées que lui avait soumises l’artiste Richard Parent.

Ce genre d’exercice sollicite également la participation du lecteur dans le processus créatif puisque ne lui sont fournies que quelques bribes de la diégèse. Il se retrouve donc au cœur d’un songe brut et fragmentaire duquel il se doit de remplir les « blancs volontaires ». L’absence de repères temporels et contextuels est, somme toute, bien déroutante, même pour un lecteur de SF expérimenté.

Ainsi, que se passe-t-il entre ce début et cette fin inventés par Champetier ? Chaque lecteur, aidé seulement d’une citation et d’un numéro de page fictifs associés à la deuxième illustration de Parent (pour donner l’illusion d’une œuvre entière), est libre, selon son interprétation, de compléter la diégèse à son gré et en cela réside l’intérêt de cet exercice de style des plus originaux.

En 1995, Joël Champetier a remporté le Grand Prix de la science-fiction et du fantastique québécois pour quatre de ses œuvres, incluant la nouvelle dont il est ici question. Le jury avait alors été particulièrement impressionné par la « puissance d’évocation des lieux et paysages », ce que le lecteur peut retrouver dans « Esclaves du sable », notamment dans la mise en place de l’univers SF dans l’introduction de la nouvelle : « À l’intérieur du champ répulsif de Niguilert, le ciel nocturne avait couleur de cendre. […] Tel des araignées d’eau, [les robots nettoyeurs] glissaient sur la surface diaphane du champ, à la poursuite des détritus qui s’y engluaient : feuilles mortes, papiers gras, oiseaux morts. […] Un vent tiède charriait un remugle de pourriture et d’huile surchauffée : il fallait avoir bien de l’imagination pour percevoir le parfum de la mer toute proche ».

L’écrivain réussit, dans cette nouvelle, à donner de la substance à ses personnages, et ce, malgré la vision extrêmement embryonnaire qu’on en offre au lecteur. On arrive même à s’imaginer, tout au long du roman fictif, le respect qui s’installe progressivement entre les deux protagonistes, que tout pourtant semblait opposer au départ.

Même le lecteur de SF le moins aguerri connaît de nom de Joël Champetier. C’est grâce à son engagement dans le domaine de l’édition (dans l’entreprise de L’ASFFQ et de la revue Solaris, notamment) et à des écrits bigarrés qui, malgré tout, sont toujours d’une grande qualité, que la réputation de Champetier n’est plus à faire dans le domaine des littératures de l’imaginaire. [JBC]

  • Source : L'ASFFQ 1994, Alire, p. 41-43.

Prix et mentions

Grand Prix de la science-fiction et du fantastique québécois 1995