À propos de cette édition

Éditeur
Mosaïque
Genre
Fantastique
Longueur
Nouvelle
Paru dans
Mosaïque, vol. 2, n˚ 1
Pagination
17-30
Lieu
Sherbrooke
Année de parution
1998

Résumé/Sommaire

M. Longtin connaît comme le fond de sa poche la bibliothèque où il travaille depuis 30 ans. Grâce à une mémoire phénoménale, il peut énumérer les titres et les auteurs de chaque livre, rayon par rayon. Mais ce jour-là, M. Longtin ressent un malaise. En se promenant dans les rangées, il aperçoit un livre qu’il n’a jamais vu, un livre vierge, sans titre, sans nom d’auteur. Pris de panique et fou de rage, le bibliothécaire escalade l’étagère de métal, le livre sacrilège entre les dents. Rendu au sommet, il vacille et tombe, entraînant les étagères dans sa chute. On le retrouve, hagard et comateux, sur un amoncellement de livres et de ruines, les mâchoires crispées sur sa proie.

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Commentaires

C’est le livre ultime, le livre de tous les possibles, une invitation à faire table rase du patrimoine littéraire et à retrouver l’innocence et la pureté des débuts. Explorer un champ vierge est certes plus stimulant que de réécrire toujours le même livre. Ce que rend le titre, à l’infinitif, qui est le degré zéro du temps des verbes. Mais pourquoi « flamber » ? Quel rapport entre le titre et la nouvelle ?

Le livre blanc peut être partout et nulle part à la fois, comme Dieu, parce qu’il échappe à toute définition, à tout classement. C’est ce qui rend dingue M. Longtin, ce bibliothécaire qui veut tout codifier, catégoriser. Mais où classer un livre qui n’a ni titre, ni nom d’auteur, ni sujet ? C’est le symbole par excellence de la liberté créatrice – et c’est ce qui fait sa force. C’est pourquoi il se retrouve au sommet de l’amoncellement de livres qui jonchent le plancher de la bibliothèque. Mais en même temps – et le paradoxe est intéressant –, on ne peut s’empêcher de penser que cela fait une belle jambe à la littérature. Vraiment, ce livre irréductible est-il supérieur à Madame Bovary, à Don Quichotte, à La Peste ?

Ce livre met aussi en évidence la faille du savoir du bibliothécaire. Sa connaissance est basée uniquement sur la mémoire, elle repose sur des trucs mnémotechniques. Elle n’est pas incarnée dans un véritable savoir comme celle de l’honnête homme du XVIIIe siècle. Quand le livre échappe à son système de classement, c’est tout le système de valeurs de M. Longtin qui s’écroule, ce que traduit éloquemment la chute des étagères où s’entassent les livres.

Il y a dans « Flamber », qui est une description d’une monomanie destructrice, une parenté évidente avec certaines nouvelles de Claude Mathieu, notamment « Présentation de la bibliothèque », « L’Auteur du « Temps d’aimer » » et « Autobiographie ». La monomanie de M. Longtin n’est pas innocente : il ne s’agit pas ici d’une fixation obsessive sur un objet quelconque (des bottes, des boîtes, des gants, etc.) mais sur un livre. Il fallait un professeur de littérature comme Ronald Larocque pour proposer une telle réflexion sur la connaissance livresque et la littérature. On voit qu’il a des lettres et qu’il connaît ses classiques – dont l’immense Borges. Son écriture est efficace, précise, tranchante. [CJ]

  • Source : L'ASFFQ 1999, Alire, p. 276-277.