À propos de cette édition

Éditeur
Beaumont
Genre
Fantasy
Longueur
Roman
Format
Livre
Pagination
267
Lieu
Montréal
Année de parution
2000
ISBN
9782895510079
Support
Papier

Résumé/Sommaire

À l’Ouest du monde d’Orbus est située l’Ansalonie, pays où l’on vénère Solinaris, le dieu du bien. À l’Est : les Terres-Noires, repaire des forces du mal qui vénèrent Zémiahl. Aristidius le Vaillant, Roi de l’Ansalonie, à la tête de son armée, s’apprête à repousser une armée d’Orques lorsqu’une montagne apparaît mystérieusement au beau milieu de la plaine où l’on allait combattre.

Amari, maîtresse de la Tour de Magie, apprenant que l’Ansalonie est menacée par ce qui se terre dans cette montagne, réunit les cinq héros qui forment les Épées de la justice, le plus célèbre groupe d’aventuriers de tous les temps : elle-même ; Aristidius ; Kocik, un guerrier si grand et si fort qu’on le surnomme le Titan ; Tyrian, prêtre de Solinaris ; et un assassin connu sous le sobriquet de Shadow.

Usant des pouvoirs magiques d’Amari, le groupe se transporte en un instant à la Montagne Rouge. Ils y pénètrent et font face à des pièges sans nombre ainsi qu’à diverses créatures maléfiques. Leurs prouesses au combat, conjuguées à la magie de Tyrian et d’Amari et aux sens aiguisés de Shadow, leur permettent de triompher – jusqu’à ce que Shadow échoue à détecter qu’une caverne a été piégée ; ses quatre compagnons sont écrasés sous des tonnes de pierre… L’instant d’après, ils se retrouvent à l’entrée de la caverne, et décident de ne pas y pénétrer. Le même phénomène se répète plusieurs fois, lorsque l’un ou l’autre des aventuriers succombe aux pièges de la montagne : les Épées de la justice sont aidées à leur insu par un mystérieux personnage qui dispose d’immenses pouvoirs.

Enfin, les compagnons atteignent le cœur des passages souterrains : le repaire d’Inferno, « le Monstre de l’immonde », un énorme dragon qui sert le Maître des Ténèbres, suppôt de Zémiahl. Le combat contre Inferno s’engage aussitôt. Les Épées de la justice ne parviennent toutefois pas à vaincre le dragon, mais leur allié invoque une tempête de glace qui force Inferno à battre en retraite.

Croyant avoir défait le dragon, les aventuriers quittent la montagne – sauf Aristidius, qui a péri au combat. Le lendemain, ils reviennent à la Cité royale, où une foule en liesse acclame la réussite de leur plus glorieuse mission. Lors du banquet que donne Palidor, le nouveau Roi de l’Ansalonie, la Cité est dévastée par Inferno. Une fois son œuvre de destruction terminée, le dragon retourne à la montagne… laquelle disparaît. Tous ces événements ont été orchestrés par l’Empereur, gardien de l’équilibre entre le bien et le mal. La catastrophe est l’occasion pour l’Ansalonie de forger des liens plus étroits avec d’autres races et d’autres royaumes, inaugurant ainsi une ère d’espoir.

Commentaires

Comme quoi les bonnes actions sont toujours punies : apercevant ce livre sur les rayons d’une librairie, j’ai averti Claude Janelle de son existence… et c’est moi qui ai dû me le taper pour en faire la critique !

Pierre Dubé aligne dans La Folie une longue liste de faiblesses propres aux débutants ; il y aurait de quoi alimenter toute une série d’ateliers d’écriture. Commençons par les bourdes typographiques : les répliques criées (et il y en a pendant des lignes !) sont mises en majuscules, tandis que les passages écrits du point de vue d’Inferno évitent de le nommer et mettent plutôt les pronoms en italiques pour des raisons qui m’échappent – car enfin, le lecteur devine bien vite de qui il s’agit…

Le style est typique du débutant qui manque de vocabulaire et veut « faire littéraire » : les substantifs frileux sont généralement emmitouflés d’adjectifs – mais toujours les mêmes. Tout, ici, est ignoble, magnifique, ou (encore et toujours !) puissant. Cette pléthore d’épithètes ne parvient pas à dissimuler la quasi-absence de descriptions, stratégie classique d’un auteur qui, ne sachant pas comment évoquer la splendeur d’un jardin, se borne à vous dire qu’il est splendide.

Dubé souffre du complexe de l’Everest : l’obligation de mettre en scène non seulement les plus grands héros ayant jamais vécu, mais de les faire visiter la plus célèbre auberge du pays, mettre sur pied la meilleure école de combat, etc. C’est d’autant plus désagréable que ces splendides héros ont des personnalités sans la moindre profondeur ; la grandeur d’âme qu’on s’attendrait à trouver chez le « chevalier saint » Aristidius est remplacée par un fanatisme tiède auquel je ne parviens nullement à croire ; il est à son moins convaincant quand il se laisse aller à sa rivalité toute puérile avec Kocik en entamant une partie de bras de fer. À moins que ce ne soit quand il s’adresse à ses soldats en les appelant « Chers amis ».

Mais à quoi s’attendre d’autre quand on a affaire à une transcription de partie de jeu de rôle ? Tous les éléments de merveilleux du récit sont tirés directement de Donjons et Dragons, et ce sans aucune mise en situation. Si vous n’avez pas lu les manuels du jeu, vous aurez un gros effort à faire pour imaginer les monstres dont l’auteur saupoudre son aventure et qui ne sont jamais décrits ; les enchantements d’Amari vous paraîtront peut-être en revanche vaguement originaux, encore qu’ils sont si platement évoqués que tout émerveillement est proscrit. Pierre Dubé, émule de Weis et Hickman ou de R.A. Salvatore, auteurs de romans « officiels » de D&D, n’a réussi qu’à illustrer combien le jeu de rôle, malgré ses éléments narratifs, se prête mal à une transposition en roman.

Et dans ce cas particulier, le problème est accentué jusqu’à l’absurde, au point où certains critiques pourraient voir dans ce livre une déconstruction délibérée du jeu de rôle et du roman de fantasy… Les interventions constantes du mystérieux allié (qui n’est autre que l’Empereur) vident la quête des héros de tout son suspense ; on croirait un maître de jeu incompétent qui ne cesse d’intervenir dans la partie, pour aider les joueurs dont les personnages sont submergés : « Euh, mettons que vous êtes pas rentrés dans la caverne, OK ? ». On nous fournit un semblant d’explication : l’Empereur guide les événements pour garder l’équilibre. Sauf que toutes ses interventions pour sauver les Épées de la justice ne servent à rien : Inferno ne sera pas tué ; il ne devait pas l’être. Si Aristidius devait mourir pour laisser la place à Palidor, pourquoi l’avoir ressuscité une demi-douzaine de fois, dont au moins trois durant son combat avec Inferno ? Cette ultime mission des aventuriers est totalement factice, et pourtant la maladresse de la narration nous oblige à conclure que l’auteur ne s’en rend pas compte – ou plutôt qu’il s’imagine que ses descriptions de batailles et d’exploration de souterrains justifient le roman.

C’est après 95 pages de mise en situation que les héros s’aventurent enfin dans la montagne ; ils reviennent à la Cité royale en page 238, trente pages avant la fin, pour un triomphe qui m’a laissé éberlué : personne n’a été averti qu’ils ont (présumément) tué Inferno ! Et toute la population comprend, sans qu’une seule question soit posée, qu’Aristidius est mort au combat. C’est peut-être ici que la pauvreté de l’imaginaire est la plus accablante : quand on sent que le triomphe des héros est une finale que l’auteur considère comme allant de soi, au point d’oublier de la justifier.

Après tout ce verbiage, il suffira de vingt pages à peine à Dubé pour dévaster une cité et faire passer le monde dans une nouvelle ère… sans omettre de jeter des pistes pour l’inévitable suite. Les Épées de la justice ayant pris leur retraite, on pourrait souhaiter que ce bouquin-là soit moins mortellement ennuyeux que La Folie, mais je n’y compte pas. [YM]

  • Source : L'ASFFQ 2000, Alire, p. 60-62.