À propos de cette édition

Éditeur
Vents d'Ouest
Titre et numéro de la collection
Ado - 2
Genre
Fantastique
Longueur
Novelette
Paru dans
La Maison douleur et autres histoires de peur
Pagination
123-162
Lieu
Hull
Année de parution
1996
Support
Papier

Résumé/Sommaire

Gabriel déménage avec sa mère dans la maison du nouveau conjoint de celle-ci. L’adolescent, plus lent d’esprit que la moyenne, rêve de plus en plus souvent à son vrai père, un policier tué deux ans plus tôt. Au bout de quelques jours, il recueille un furet que son père lui avait donné en rêve. Le petit animal fait une escapade dans les cloisons de la maison et rapporte quelques menus objets qui éveilleront les soupçons de l’éducatrice de Gabriel. André Vaugeois, le propriétaire de la maison, est-il aussi fréquentable et respectable qu’il en a l’air ?

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Commentaires

La nouvelle de Joël Champetier, dont l’esprit et la manière rappellent certains textes de Stephen King, m’a laissé perplexe et dubitatif sous plusieurs rapports. On reconnaît la sensibilité de l’auteur qui dépeint avec beaucoup d’empathie le quotidien de Gabriel, sa capacité à se glisser dans la peau de cet adolescent « différent ». La relation père-fils, de même que celle de l’éducatrice et de son élève, témoignent aussi des qualités humaines de l’écrivain qui ne craint pas d’aborder les liens d’amour filial et d’affection. On pense au film touchant et lumineux de Louise Archambault, Gabrielle, d’autant plus que – coïncidence peu banale – le personnage central de Champetier porte le même prénom.

Le fantastique s’insinue subrepticement dans le récit par l’entremise des rêves que fait Gabriel. Son père, au-delà de la mort, utilise son fils et le furet – qui donne son nom au titre de la nouvelle, clin d’œil à un dessin animé de Walt Disney (ça manque à ma culture) – que celui-ci a adopté pour démasquer le meurtrier de six adolescents. L’importance du furet (dans l’intrigue et le quotidien de Gabriel) constitue en outre une sorte d’éloge de la thérapie par les animaux à laquelle Champetier croit visiblement.

Toutefois, outre le fait que l’histoire du tueur en série est plutôt convenue, le dénouement manque terriblement de vraisemblance. Le modus operandi et les motivations du meurtrier sont passés sous silence. On n’explique pas davantage pourquoi toutes les victimes de Vaugeois sont des adolescents de quinze ans. C’est un choix, certes, mais on est loin de l’originalité de l’intrigue de La Mémoire du lac paru un an plus tôt.

En fait, il y a trop d’éléments arbitraires dans « Icabod Icabod Crane ». Les adolescents assassinés sont confinés dans un centre commercial, sorte de purgatoire ou de limbes. Cette image forte pour décrire leur ennui et leur désœuvrement ne manque pas d’ironie – voir « Visite au comptoir dénébolien » pour saisir la vacuité de ces temples de la consommation ! Mais pourquoi sont-ils prisonniers de ce lieu ? Ils ont été assassinés, ce ne sont pas eux qui ont commis un crime. Pourquoi cette sanction ?

La qualité de l’écriture n’est pas en cause ici ni les valeurs transmises par l’auteur, empreintes d’humanisme et d’espoir dans la justice et la vie. C’est la mécanique de la construction, l’articulation des éléments de l’intrigue qui fait défaut dans ce texte nettement en deçà du talent de Joël Champetier. La forme plus ou moins brève de la nouvelle ne justifie pas la précipitation du dénouement. C’est du moins l’impression que j’ai ressentie à la lecture d’« Icabod Icabod Crane ». [CJ]

  • Source : L'ASFFQ 1996, Alire, p. 58-59.