Inauguration

Depuis que la STCUM a entrepris le prolongement du métro au nord de l’île de Montréal, des événements mystérieux se produisent sur le chantier de construction. Disparitions d’ouvriers, actes de sabotage, apparitions de spectres se succèdent alors que les autorités tentent d’étouffer l’affaire. Le jour de l’inauguration de la nouvelle ligne, les stations sont détruites sous l’effet d’une implosion.

Chroniques du métro présente une collection de petites vignettes de la vie quotidienne animée par la faune pittoresque des usagers du métro. L’auteure se fait portraitiste en décrivant les petites joies, les émotions et les grands drames de ces passagers. Mais d’idées, point. Je ne dis pas que l’auteure n’a pas d’imagination mais « Inauguration » est la seule nouvelle dont l’énonciation repose sur une idée, soit la formulation d’une théorie sur le temps.

En creusant le tunnel de la nouvelle ligne, les ouvriers ont franchi la frontière qui sépare le monde matériel du monde immatériel. Or, les deux mondes ne peuvent partager le même espace, l’antimatière risquant d’absorber la matière. Si les humains ne veulent pas disparaître, ils doivent rétablir le plus vite possible la frontière.

L’univers souterrain propre au métro est parfaitement intégré ici à l’économie du texte qui accède ainsi à un autre niveau de signification, plus symbolique. Il contribue à enrichir une conception humaine du temps qui repose sur le principe que « le passé, le présent et le futur existaient au même moment, parallèlement ».

La nouvelle se double d’une intéressante étude sur le nouveau couple à travers l’histoire de la rencontre de Jacques, un journaliste, et de Claire, une photographe qui voit au-delà des apparences. Leur relation, qui constitue le second pôle d’intérêt de la nouvelle, est bien décrite par l’auteure et témoigne d’un nouveau rapport amoureux fondé sur la curiosité intellectuelle bien plus que sur le sexe.

Pour toutes ces raisons, « Inauguration » est sans doute l’une des meilleures nouvelles du recueil de Louise Champagne. [CJ]

• Source : L'ASFFQ 1992, Alire, p. 53.