À propos de cette édition

Éditeur
Fides
Titre et numéro de la collection
Bibliothèque québécoise
Genre
Fantastique
Longueur
Nouvelle
Paru dans
Anthologie de la nouvelle et du conte fantastiques québécois au XXe siècle
Pagination
219-238
Lieu
Montréal
Année de parution
1987
Support
Papier

Résumé/Sommaire

Un soir, Haller conte à Sir Thomas une histoire incroyable : un livre le force à accomplir certains gestes, comme façonner ce petit miroir de mercure. Il a peur, se sent condamné. Depuis, Haller a disparu et Sir Thomas a succombé lui aussi au charme du livre, lui aussi a façonné le miroir et lui aussi s’y perdra, réduit en cendres. Mais pas avant d’avoir envoyé le livre à une personne qu’il ne connaît pas…

Première parution

Livre de Mafteh Haller (Le) 1986

Autres parutions

Commentaires

Par sa forme et son sujet, ce texte est l’un des plus classiques de Marie José Thériault. Il raconte l’histoire d’un livre maudit, d’une malédiction qui se perpétue, thème qu’on a souvent vu en littérature fantastique. Si, par conséquent, la fin n’est pas inattendue, elle présente une variante intéressante : les victimes sont réduites en cendres. Ce qu’ils deviennent après la traversée du miroir ? L’auteure n’élabore pas et c’est bien ainsi. Au lecteur d’apporter sa propre lumière sur la signification de cette machination.

Il reste qu’on se demande comment Sir Thomas a réussi à témoigner par écrit de ce qui lui arrive alors que les victimes précédentes ne l’ont pas fait. Convention narrative oblige, sinon le texte n’existerait tout simplement pas. On aurait aimé un point de vue de narration moins typé, mais en existait-il un autre qui soit possible ?

L’écriture, ici, est moins orientée vers la virtuosité poétique qui constitue généralement la marque des textes de Marie José Thériault. On dirait qu’elle a refréné son style lyrique de sorte que l’écriture est moins omniprésente et vise à donner un effet de quotidienneté. Par analogie, pensons à la lettre qu’un mari écrirait à son épouse plutôt qu’à celle qu’une femme adresserait à son amant.

« Le Livre de Mafteh Haller » ravira cependant les bibliophiles grâce à son érudition livresque, à son vocabulaire spécialisé (colophon, fermail, etc.), à la calligraphie persane qu’il contient. Il creuse la relation très ambiguë et sensuelle que les gens entretiennent avec le livre, ce qui en fait un hymne à l’amour livresque. Le charme du texte opère de la même façon que le livre maudit ensorcelle Sir Thomas et Mafteh Haller.

La soif effrénée du savoir est sans doute à l’origine de la soumission des personnages. En se rendant compte que l’homme subit les événements, ils apprennent la dure leçon du destin. L’auteure considère qu’il y a un prix à payer pour la connaissance, privilège réservé à quelques êtres choisis, puisqu’elle est source de lucidité mais aussi de malheurs.

À partir d’un thème fantastique classique, Thériault a réalisé une variation habile et somme toute personnelle qui suscite l’amour plus que la passion. [RB]

  • Source : L'ASFFQ 1987, Le Passeur, p. 174-175.