À propos de cette édition
Résumé/Sommaire
Il y a seize ans, la reine du royaume de Bragure est allée dans la forêt, vêtue de sa robe rouge de « vierge à prendre ». Un météore venait de tomber parmi les herbes roussies. Un homme aux cheveux noirs et aux yeux jaunes, à la fois sauvage et séduisant, s’est uni avec elle. Neuf mois plus tard, un garçon nommé Anne voit le jour. Il est un « Aîné », ces derniers, considérés comme privilégiés, naissant tous de pères inconnus. Le comportement étrange d’Anne s’accentue au fur et à mesure qu’il devient pubère. Alors que des barbares envahissent la plaine, les esclaves de la reine commencent à craindre le jeune prince. Certaines d’entre elles trouveront la mort tandis que, peu à peu, des hommes noirs s’introduisent dans les murs du palais…
Commentaires
Le titre simpliste de cette nouvelle, « Maternité », ne rend pas hommage à la richesse de l’arrière-monde mis en place par Marie-Claire Gilles. L’univers de ce texte fantaisiste est en effet cohérent et bien développé, énigmatique à souhait. De plus, l’auteure réussit à esquisser, par petites touches, une atmosphère intemporelle teintée d’épouvante. Le style, soigné mais dépourvu de lourdeurs, contribue à consolider une ambiance particulièrement évocatrice : « Je voulais voir les roses avant que le soleil de la quatrième heure ne fît peser leur front. Seules, Cassilda et Bérénice m’accompagnaient, petites ombres noires et nues. […] Bérénice avait des gestes d’oiseau furtif » (p. 54).
Toutefois, la complexité du cadre mis en place m’a fait regretter la brièveté de cette nouvelle, qui aurait mérité un plus long développement. Certains personnages plus esquissés (la reine, les servantes…) auraient alors pu gagner en densité. Car, par moments, j’avais l’impression de lire un synopsis. Mais un très bon synopsis, qui aurait pu être rehaussé par l’ajout de quelques éléments (par exemple, qu’est-il arrivé au roi Choré ? Comment se nomment les royaumes voisins de Bragure et quelles relations entretiennent-ils entre eux ? Pourquoi les barbares de la plaine se révoltent-ils ?).
En l’état, « Maternité » procure un dépaysement grâce à ses territoires fantaisistes dont il serait dommage de se priver. Et rares sont les textes dont la chute inspire à ce point l’effroi et font ainsi tressaillir : « Des hommes noirs, en foule incalculable, sont dans la plaine. Certains déjà passent les murs. J’entends leurs chants » (p. 59). [AG]
- Source : Les Années d'éclosion (1970-1978), Alire, p. 224.
