Menace sur Montréal

François et Paul, dont la longévité a été prolongée par les hommes verts, vivent depuis trois cents ans sur Err-Hêt, une planète pacifique. Auparavant, ils demeuraient au Québec (à l’époque de la Nouvelle-France). C’est lors de leur voyage de retour en direction de leur lointain système solaire d’adoption qu’ils ont ramené un passager clandestin : Ouar-Ouil, savant fou jadis réfugié sur la Lune.
Trois siècles plus tard, Ouar-Ouil réussit à s’échapper de sa prison sur Err-Hêt et souhaite conquérir la galaxie. C’est pourquoi François, promu commandant, son acolyte, Paul, et Eksk-Hiz, fille du chef des hommes verts, se lancent à sa poursuite. Ils font d’abord escale sur la Lune, qui aurait prétendument abrité une ancienne civilisation souterraine. Mais Ouar-Ouil capture le trio, qu’il tente d’hypnotiser. Il échoue, vaincu par la force psychologique de ses adversaires. Toutefois, le savant fou ne se résout pas à la défaite : au contraire, il emprisonne François, Paul et Eksk-Hiz à l’intérieur d’un dôme étanche dans le nord du Québec, afin de les garder captifs tandis qu’il s’apprête à détruire Montréal.
Tant bien que mal, le trio parvient à se libérer avec l’aide des Err-Hêtiens et se lance à la poursuite d’Ouar-Ouil. S’ensuit un combat au-dessus du mont Royal au cours duquel le savant sera partiellement paralysé, ses adversaires le croyant hors d’état de nuire jusqu’à l’ultime face-à-face dans une grotte lunaire. Finalement, le trio triomphera des difficultés et prendra l’initiative de rester sur Terre, François et Eksk-Hiz décidant pour leur part de se fiancer.

• Menace sur Montréal (1978) - Novella

Menace sur Montréal est le second livre de Louis Sutal paru dans la collection Jeunesse-pop, dédiée aux adolescents. C’est aussi le deuxième titre d’une série qui gagne à être lue dans l’ordre, les différents tomes n’étant pas complètement autonomes. Ainsi, le lecteur qui n’a pas pris connaissance du premier opus, La Mystérieuse Boule de feu, trouvera sans le moindre doute les personnages de Menace sur Montréal falots et unidimensionnels. Puisque les protagonistes sont peu fouillés (Paul, surtout, n’a pas vraiment d’individualité et s’avère d’une étonnante passivité), ne pas avoir accès à leur passé en Nouvelle-France handicape significativement le livre. Le personnage du vilain, Ouar-Ouil, n’échappe pas non plus à ce manque de « polissage », se bornant à être un méchant superficiel qui raconte ses plans à ses prisonniers quand il n’est pas en train de rire cruellement.
Néanmoins, un progrès est perceptible entre le premier et le second tome de la série, notamment du côté de l’écriture, qui a gagné en précision. Du côté des améliorations, les illustrations intérieures du livre sont de surcroît plus réussies et adaptées au public cible.
Hélas ! le public cible est parfois infantilisé dans ce roman, entre autres par les nombreux rappels quasi didactiques de la quête d’Ouar-Ouil qui parsèment le récit : « Maintenant, poursuit le savant, je suis le seul habitant de la Lune. C’est mon satellite… à moi seul. Vous êtes venus ici pour me capturer. Et c’est moi qui vous retiens prisonniers… Mieux encore, vous m’avez fourni un vaisseau spatial plus moderne que celui à bord duquel je me suis enfui d’Err-Hêt… » (p. 50-52). À qui s’adresse ce récapitulatif ? Certainement pas à nos explorateurs en mission, parfaitement au fait de ces informations ! À un lecteur extrêmement inattentif ? (ahhh ! le fameux passage où le méchant expose en détail ses plans à ses victimes condamnées d’avance, l’auteur en est visiblement friand). Des paragraphes rappelant les finales de la série télévisée Batman sont en outre au programme et m’ont fait sourire quelquefois : « Comment les trois amis acceptent-ils d’entendre ces paroles sans réagir ? Quelle force mystérieuse les retient, impuissants, devant le savant fou ? Jusqu’à quel point se trouvent-ils en danger ? […] Réussiront-ils à se libérer ? Sinon, quel pénible sort les attend ? (p. 52).
Un mot également sur l’évolution « tortuesque » de la relation amoureuse de François et d’Eksk-Hiz (oui oui, comme dans « exquise »…), la belle extraterrestre, qui, après trois cents ans (!) de fréquentation, décident enfin de se fiancer, leur relation n’ayant – du moins aux yeux du lecteur – aucunement progressé entre le premier et le second tome. En trois siècles !
Menace sur Montréal, avec son amusante scène de combat volant au-dessus du mont Royal, se veut donc un divertissement dans lequel l’aventure est menée tambour battant. Par contre, il ne faut pas y chercher outre mesure la vraisemblance tandis que François, Paul et Eksk-Hiz « par un hublot […], observe l’espace et, devant eux, la Terre où ils sentent que de captivantes aventures les attendent ensemble… » (p. 123). [AG]

• Source : Les Années d'éclosion (1970-1978), Alire, p. 381-382.

• Lortie, Alain, Requiem 19, p. 17.