À propos de cette édition

Éditeur
La Presse
Genre
Fantastique
Longueur
Nouvelle
Paru dans
La Presse, vol. IX, n˚ 45
Pagination
5
Lieu
Montréal
Date de parution
24 décembre 1892

Résumé/Sommaire

Pour avoir transgressé les ordres du Seigneur et « persisté dans leur idolâtrie et leurs débordements », les habitants de la ville d’Herbauges sont punis : le sol tremble et un déluge inouï tombe du ciel, engloutissant la ville et ses habitants impies.

Un homme et sa famille seront sauvés parce qu’ils avaient donné asile à saint Martin, nouveau prophète bafoué, qui appelle en vain au repentir avant d’évoquer le châtiment divin. Au cours de leur fuite, et malgré les avertissements du saint, la femme « se retourne et tend les bras vers la ville que la main vengeresse de Dieu pulvérise ». Pour sa faute, elle sera transformée en menhir.

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Commentaires

Cette légende, dont l’action se situe en Bretagne, est divisée en trois parties. Dans un premier temps, l’auteur-narrateur évoque les légendes bretonnes, en souligne le nombre et la variété et plonge d’emblée le lecteur dans un univers non pas fantastique, mais qui appartient au merveilleux – légende du roi d’Is, évocation des amours de la fée Viviane et de l’enchanteur Merlin, par exemple – et nous situe géographiquement le lac de Grandlieu dans lequel se trouvent, dit-on, les « ruines englouties d’une ville maudite ».

Puis, après une formule rituelle propre au conteur : « Voici maintenant ce que raconte la légende », l’auteur nous fait le récit de ce qui arriva à la ville d’Herbauges, vers la fin du VIe siècle après Jésus-Christ. C’est une version bretonne actualisée de la destruction de Sodome et Gomorrhe et du châtiment de la femme de Loth, transformée en statue de sel.

Dans la troisième et dernière partie, l’auteur nous raconte qu’il a vu et touché le menhir de granit appelé “la femme de pierre” qui est encore aujourd’hui l’objet des superstitions locales. Il termine son récit par une note humoristique. En effet, les gens de l’endroit prétendent qu’« il ne faut pas la vexer […] car elle est très méchante ». « On le serait à moins », conclut le narrateur.

Toute en atmosphère, cette histoire, qui n’a de rapport avec le conte que dans sa partie centrale (accent mis sur la narration et les dialogues) est un exemple typique du légendaire national (ici, la France, mais il y a des milliers d’exemples au Québec et partout ailleurs dans le monde) parfois très proche du mythe. L’origine ou l’histoire des éléments naturels ou géographiques – ici un menhir, ces rochers pleins de mystère et de symbolisme, fortement ancrés dans la tradition populaire et magique de la Bretagne – est évoquée et “expliquée” dans le cadre d’un récit légendaire à connotation morale et religieuse.

La partie centrale est particulièrement prenante avec l’évocation réaliste et terrifiante du cataclysme qui s’abat sur la ville maudite, ainsi que la métamorphose soudaine de la femme en rocher.

Mais il ne s’agit là que d’une partie du texte (en gros la moitié), elle-même encadrée par des considérations autres et relatives aux légendes de la Bretagne qui est aussi, dit le narrateur, « un peu le pays de nos pères ». [NS]

  • Source : Le XIXe siècle fantastique en Amérique française, Alire, p. 87-88.