Mystérieuse Boule de feu (La)

1662, Nouvelle-France. Une nuit, un immense globe de flammes traverse les terres labourées des Ménard. À la fois effrayés et fascinés, les Ménard voient le phénomène s’immobiliser au-dessus de la tête de François, l’homme engagé. François, dont les pensées sont momentanément possédées par une force extérieure, réussit finalement à reprendre contenance. Mais une étrange voix résonne de temps à autre dans son crâne, le sommant d’aller vers le Nord. Étant donné que François, aussi coureur des bois, a l’habitude de faire du troc avec les Amérindiens, il obéit à la requête, accompagné de Paul, le fils des Ménard.
Au nord de la forêt, les Amérindiens les avertissent de la présence d’une mystérieuse boule de feu. Il s’agit en fait d’un vaisseau extraterrestre, dans lequel Paul et François sont emprisonnés. Ils font la rencontre du chef des hommes verts, Akk-Thiph, qui les oblige à changer de corps avec deux des siens, partis en exploration sur la Terre. Mais les semaines s’écoulent, et les visiteurs d’outre-espace doivent retourner sur leur planète. Ils contraignent donc Paul et François, dont les esprits sont temporairement captifs de cages, à revêtir les enveloppes charnelles des extraterrestres qui vivent dans leur corps, auprès des Ménard. Heureusement, la fille du dirigeant, Eksk-Hiz, que François a sauvée d’une mort certaine, vient en aide aux détenus décorporalisés.

Le ton de La Mystérieuse Boule de feu, similaire à celui des romans du terroir, n’est pas sans surprendre pour une parution de 1971. L’auteur présente une vision très classique, pour ne pas dire de l’ordre du cliché, du travail de la terre, les hommes s’activant aux champs pendant que les femmes œuvrent à la cuisine. Le contraste est d’autant plus saisissant avec l’aventure relevant de la science-fiction qui se déroule en seconde partie. Nous avons cependant affaire à une science-fiction de surface, qui n’explicite pas vraiment les prétendues avancées technologiques des hommes verts. De surcroît, les descriptions du vaisseau extraterrestre ne pêchent pas par leur précision : « des appareils inconnus, aux formes bizarres et toutes faites de métal à l’aspect brillant recouvrent le plancher de l’objet mystérieux. »  (p. 61).
Certes, La Mystérieuse Boule de feu est un roman destiné à un jeune public, mais son peu d’inventivité et sa naïveté laissent parfois songeur. Est-ce réellement amusant que la jeune extraterrestre « séduisante » se prénomme Eksk-Hiz et que son père, seul homme vert à jouer un rôle véritable en dehors de sa fille, s’appelle Akk-Thiph ? De plus, la communication par télépathie fait figure de déjà-vu (je note cependant la trouvaille des cages qui retiennent les esprits dans l’atmosphère).
Je n’ai pas pu m’empêcher de penser que ce roman était l’œuvre d’un auteur qui avait peu frayé avec le genre de la science-fiction. Cet amateurisme transparaît dans l’écriture, généreusement saupoudrée de points de suspension, de passages surexplicatifs et d’impropriétés.
Mais je dois concéder qu’il y a quelque chose d’amusant dans ce livre, que cette aventure légère et surannée nous fait parfois sourire (pas toujours volontairement). Malgré des accrocs à la vraisemblance, la quête de François et de Paul nous donne parfois envie de monter à bord du « vaisseau de l’espace [qui] s’envole dans la nuit qu’il éclaire violemment de ses flammes » (p. 109). [AG]

• Source : Les Années d'éclosion (1970-1978), Alire, p. 382-383.

• Lortie, Alain, Requiem 19, p. 17.