À propos de cette édition

Éditeur
Alire
Titre et numéro de la série
Les Chroniques infernales - 5
Titre et numéro de la collection
Romans - 23
Genre
Fantasy
Longueur
Roman
Format
Livre
Pagination
265
Lieu
Beauport
Année de parution
1999
ISBN
9782922145298
Support
Papier+
Illustration

Résumé/Sommaire

Rel, souverain des enfers, veut gagner Vrenalik. Il soulage son ami Tryil, l’oiseau télépathe, condamné à un dur châtiment par ses collègues bourreaux, et gagne le pays où il a été le plus heureux, en compagnie de son aide, Taxiel, de son ami Sutherland et de sa conjointe, Lame. Cette dernière devient vite mal à l’aise et doit bientôt rebrousser chemin. Aussi Rel lui facilite-t-il le départ en la nommant sa représentante auprès des juges du destin, et pare à son absence en lui laissant un souvenir d’enfance, le très long code qui ouvre la porte entre Vrenalik et les enfers froids, porte par laquelle il s’échappait, et trouvait sa pureté d’enfance, jadis. Il lui apprend ce précieux code en le lui traçant sur la peau.

À Arxann, capitale des anciens enfers, Lame décide de faire une excursion aux anciens enfers mous mais, mal adaptée au rythme de ce monde, si différent de celui de Vrenalik sous glaciation, elle tombe dans un piège monté par des fourmis mutines qui l’investissent, la droguent et la paralysent, ne lui laissant que sa conscience comme territoire propre et son sens du toucher. Lame connaît immédiatement son sort : gonfler sans fin pour nourrir les fourmis, et être tenue en vie par elles. Ainsi Lame devient-elle lentement une énorme larve enfouie dans le sable dont les traits et les souffrances demeurent cachés et inconnus à qui ne participe pas de cette sombre osmose.

Parce qu’il est télépathe et qu’il survole la région, l’oiseau Tryil trouve Lame et la châtie lui aussi, mais l’éveille à la conscience du dehors. Il part avertir Rel qui s’est installé sur une banquise à Vrenalik.

Aiguillonnée par l’oiseau, Lame imagine alors son ventre comme une grande porte de cuir aux enfers mous, par laquelle délivrer certains ancêtres, un peu responsables des défaites intérieures de sa vie passée. Puis elle ménage en elle un véritable gîte pour les damnés et y abrite un homme généreux qui, avant de mourir, enchante le lieu pour transfigurer l’intérieur de Lame.

Rel délègue à Sutherland la tâche délicate de secourir son épouse. Il doit trouver un moyen de réveiller ses sens. En tandem avec Tryil, sur le dos duquel il vole, Sutherland réussit. Le code de la porte conféré par Rel, une fois rappelé à sa mémoire, réveille Lame à l’évidence de tout ce qui n’est pas sa déchéance, et la sort enfin de sa dépression abyssale. La situation se révèle moins désespérée qu’elle ne l’avait cru. Une autre transformation s’opère. Plus heureuse et tendre, celle-là.

Commentaires

Il y a beaucoup de symboles dans ce livre. Ils émaillent le départ pour Cythère-Vrenalik, sensualisent l’amour de Lame et de Rel avant leur séparation. Ils donnent une sobre splendeur poétique à un récit fort inhabituel et très ouvert. Couleurs, substances, nombres. Ils sont la géographie du mystère d’être. Rarement des chiffres écrits en mots brillent-ils comme dans Or.

Le texte, qui se surveille un peu, se ramène avec une désopilante bonne foi tant les images mystiques en déborderaient. Le récit se gouverne de près, évitant les illuminations (qui souvent le frôlent), et il se trouve, par là même, animé d’une tension qui fait piège. Pour une fois dans la série des Chroniques infernales, Esther Rochon ne sous-écrit pas, bien que la phrase soit souvent d’une économie étonnante, une économie qui vient d’une maîtrise de l’écriture, plutôt que du contraire. Ce livre le montre une fois pour toutes. Il sort quelque chose entre les lignes et les chiffres et les mots. Dont on peut être aussi prisonnier que les hommes sur la banquise et la femme dans le sable. Mais consentant, aussi.

Le seul agacement vient de quelques petites répétitions inutiles qui pourraient facilement être corrigées lors d’une prochaine édition. Ces répétitions, peut-être voulues, préparent le lecteur au futur malaise de Lame. On s’apercevra, en deuxième lecture seulement, combien l’écrivaine soigne son lectorat et le ménage en lui donnant énormément d’indices (dans les 60 premières pages), pour préparer l’insolite voyage intérieur qui se déroule en images percutantes et étranges tout au long du texte. Le vraisemblable s’étoffe d’une étrangeté bien composée. L’inquiétude ainsi générée est sombre enchanteresse. Ce procédé peut passer inaperçu d’abord. D’ailleurs, Lame discute beaucoup avec elle-même, et ce qui pourrait lasser séduit. Assez pour tenir pendant de très nombreuses pages dans la peau éperdue d’une femme captive des autres et de sa seule conscience.

Parfois, des pensées plus cristallines, évitant les sophismes faciles, viennent émailler la narration, en couper la linéarité. Des voix prophétiques s’avancent. Jamais ridicules. D’une adresse indubitable. Ce sont des bijoux d’expression sur la colère, la rage, la dépression et leur résolution délicate. Un point de vue original. Un rythme qui ne s’oublie pas. On en voudrait plus, mais encore une fois, Esther Rochon dose avec beaucoup de souci.

Or. C’est un livre sur la vie intérieure. Littéralement. Et l’un des meilleurs livres sur la vie intérieure. Mine de rien. Un livre magistral. [ALa]

  • Source : L'ASFFQ 1999, Alire, p. 148-150.

Prix et mentions

Prix Jacques-Brossard 2000

Références

  • Anonyme, Lettres québécoises 95, p. 57.
  • Cloutier, Georges Henri, Solaris 131, p. 41-42.
  • Fortier, Christine, Guide Ressources, janvier 2001, p. 17-18.
  • Fortier, Christine, Voir (Montréal), 09/15-12-1999, p. 58.
  • Péan, Stanley, Le Libraire, mars 1999, p. 24.
  • Trudel, Jean-Louis, KWS 34, p. 25-27.