À propos de cette édition
Résumé/Sommaire
François Guérin et ses deux amis d’Err-Hêt, Eksk-Hiz et Akk-Thiph, ont fui ce monde trop civilisé d’Err-Hêt tombé sous le joug d’une dictature fasciste après l’avoir servi comme patrouilleurs de paix.
Toutefois, leur vaisseau spatial, abîmé par un tir ennemi quand ils ont pris la fuite, menace de tomber en panne loin de la Terre qu’ils espéraient rejoindre. La première tentative de réparer l’avarie échoue, mais un second essai permet à l’astronef de se poser sur une planète repérée in extremis.
En traversant la jungle pour se rendre dans une ville entr’aperçue par Eksk-Hiz, le trio est capturé par les Relliks, qui sont en guerre contre les Rerethguals. François et ses amis sont libérés par des Rerethguals surgis à point nommé, qui les conduisent dans leur Cité gouvernée par un Commandant autoritaire.
Après avoir croisé une mère privée de ses deux fils par les lois iniques de la Cité, le premier exécuté et le second emprisonné, les trois voyageurs sont enrôlés d’office dans l’armée des Rerethguals et ils subissent les avanies réservées à tous les conscrits à qui on veut inculquer une discipline aveugle. Quand les nouvelles recrues sont chargées de surveiller les prisonniers, François retrouve le second fils de cette mère éplorée. Il organise alors une vaste évasion, réalisée avec l’aide des armes surpuissantes d’Err-Hêt, et le trio accompagne un groupe de fugitifs pacifistes jusqu’aux ruines d’une ville ancienne qui témoigne de l’existence jadis d’une civilisation supérieure qui a provoqué son propre anéantissement.
En essayant d’exploiter une technologie de cette époque merveilleuse, qui permet de recueillir et de sélectionner des images du passé de tout l’univers, François déclenche un écroulement qui leur permet d’accéder à des locaux inexplorés et de mettre la main sur la pièce qui manquait à leur vaisseau. Les trois amis peuvent repartir pour la Terre.
Commentaires
Survivant de la Nouvelle-France, François Guérin est devenu le protagoniste d’une série de romans pour jeunes dont ce volume est le sixième et dernier. Recruté avec un ami de la Nouvelle-France par la civilisation extraterrestre de la planète Err-Hêt, il a fait équipe avec deux Err-Hêtiens jusqu’à la révolution fascisante d’Err-Hêt qui a entraîné leur désillusion à tous les trois.
En tant que tel, ce roman est d’un intérêt très mince. Comme il s’insère de manière inopinée dans un voyage à destination de la Terre et ne doit avoir aucune incidence sur la suite des choses, il correspond à première vue à un détour. Sommés de choisir entre deux camps, les trois fuyards prennent le parti de soutenir une dissidence pacifiste.
Dans le contexte de la Guerre froide, ce choix de renvoyer dos à dos les belligérants n’était sûrement pas innocent. Sutal ne laisse planer aucune ambiguïté sur la nature des adversaires en présence, qu’il nomme les tueurs (killers) et les massacreurs (slaughterers) en inversant la graphie des mots anglais correspondants. Il était friand de ces clins d’œil puisque le monde d’Err-Hêt inverse les sonorités du nom de la Terre tandis qu’une lecture phonétique des noms des compagnons de François révèle qu’ils sont Actif et Exquise.
À ses débuts, la série de Sutal s’inscrivait dans la lignée des histoires de patrouille galactique – d’abord définies par Edmund Hamilton, mais illustrées à l’époque par Valérian et Laureline ou Star Trek. Ses personnages incarnaient le progrès technique et le bon droit. La décision de Sutal de révéler que l’envers du décor n’était pas si rose et que l’idéalisme des héros profitait à un régime cynique reflète peut-être l’actualité nord-américaine de la décennie, du scandale de Watergate aux États-Unis au mandat de la commission McDonald au Canada. Ce volume promettait de relancer la série, mais il est resté sans suite.
Si l’intrigue de base est linéaire, l’auteur l’agrémente de digressions didactiques et philosophiques. Les considérations sur la courbure de l’Univers et le déplacement du vaisseau à l’intérieur d’une série de sous-espaces emboîtés surprennent dans le cadre d’un roman pour jeunes de cette eau, tout comme l’abondance de détails techniques. Le résultat reste loin des meilleurs exemples de science-fiction pour jeunes, de Heinlein à Grenier. Malgré sa pauvreté narrative, il témoigne pourtant d’une indéniable ouverture à la complexité technico-scientifique et morale dans une société en pleine modernisation. [JLT]
- Source : Les Années d'éclosion (1970-1978), Alire, p. 384-385.
Références
- Lortie, Alain, Requiem 19, p. 18.