À propos de cette édition

Éditeur
NBJ
Genre
Fantastique
Longueur
Nouvelle
Paru dans
NBJ 62
Pagination
52-56
Lieu
Montréal
Année de parution
1978

Résumé/Sommaire

Des individus sont confinés dans une clinique aux allures d’établissement psychiatrique parce que, si l’on en croit le narrateur, ils souffrent d’une étrange « maladie de la matière », de nature épidémique, suivant laquelle une sorte d’enveloppe se superpose sur les individus et les choses. Cette « couche » produit à son tour une couche qui produit une couche… Le seul moyen de contrer cette spirale sans fin : dépoussiérer, laver, nettoyer partout et tout le temps.

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Commentaires

« Je ne sais pas si je suis fou, mais j’ai l’impression de vivre dans un monde trop serré », lance le narrateur d’entrée. Si ce dernier est sain d’esprit, c’est donc la planète elle-même qui est devenue folle. Monde trop serré ? C’est peu de dire, à l’instar de Lavoisier, que « rien ne se perd » : dans cette nouvelle de Louis-Philippe Hébert, tout s’additionne et s’accumule, la Terre se densifie à la vitesse grand V, dans un mouvement qui a atteint un point de non-retour, et risque l’implosion. La maladie de la matière qui frappe cette société peu définie, mais que l’on devine dystopique, donne lieu à des images quelque peu cauchemardesques : par exemple celles de chats et de chiens errants qui ont atteint le poids incroyable de trois cents livres et qui se grattent frénétiquement avec leurs pattes de derrière, « jusqu’à épuisement », afin de se débarrasser de leurs couches excédentaires.
Pour l’essentiel, « La Pelure » est axée sur une description minutieuse des manifestations de la maladie – maladie dont les causes ne seront jamais divulguées – et des mesures prises par les autorités pour y faire face. Comme bien souvent dans la SF, la menace épidémique s’accompagne ici d’éléments tels l’isolement de citoyens contre leur gré, la toute-puissance d’une caste de scientifiques, la négation du droit à l’information – la vérité sur la maladie n’est jamais dite : tous codes dont Louis-Philippe Hébert use d’une manière distanciée, avec un certain humour noir.
On pourrait voir aussi se profiler, dans cette injonction au nettoyage faite à la population, le thème de l’épuration, d’une épuration applicable à toutes les formes de différences et à toutes les singularités dès lors que la planète est confrontée à une croissance démographique potentiellement dangereuse. « “Allons-y par élimination”, c’est le mot d’ordre », remarque d’ailleurs le narrateur qui, seul contre tous, se révolte. Mal lui en prendra, mais ça, c’est une autre histoire…
Au final, Hébert livre un agréable exercice de style inscrit sous le signe de la facétie avec, à la clé, évocation d’un futur totalitaire pour l’humanité. [FB]