Petits Tableaux lourds (Les)

Le divorce de Philippe et d’Élise provoque les souvenirs de la relation adultère de cette dernière avec un homme d’âge mûr, Florian. À la veille du déménagement de Philippe, Élise se promène parmi les tableaux décrochés des murs, agitant sa mémoire jusqu’à ce que les fantômes de Florian et de sa grand-mère, et ainsi, la mort, viennent la chercher.

La nouvelle fantastique d’Holden est un magnifique récit empreint de nostalgie. L’effet fantastique prend toute sa force dans le fait qu’initialement, on croit que Philippe et Élise vivent un divorce, alors que la finale du récit semble évoquer que le divorce n’est en fait que la séparation du couple provoquée par la mort d’Élise. Les tableaux lourds, tous tombés par terre, sont les souvenirs de la femme, qui se remémore particulièrement sa relation adultère.
Ce sont les petits indices du fantastique qui illuminent la nouvelle : les signes selon lesquels Élise n’a plus de futur, que le passé, le souvenir d’une apparition spectrale de Florian dans la maison, que venaient tout juste d’acheter Philippe et elle, ou le décor qui devient tout d’un coup noir et blanc, tel un vieux film. L’un des thèmes de la nouvelle, le deuil, reste pourtant flou à savoir s’il est davantage question du deuil d’un mariage que du deuil d’êtres humains.
La véritable incertitude, celle qui corse tout le récit, est donc cette impression laissée par la lecture que j’en ai faite selon laquelle Florian est un spectre, sinon une vision de celui qui attend Élise à son passage dans l’au-delà. Toute la beauté de la nouvelle d’Holden tient à sa richesse en indices sur sa nature fantastique, en métaphores, en non-dits et en descriptions mélancoliques, ce qui nous encourage à la relire. [SG]

• Source : Les Années d'éclosion (1970-1978), Alire, p. 268.