À propos de cette édition
Résumé/Sommaire
Un transatlantique, Le Gaspé, disparaît dans le Saint-Laurent sans laisser la moindre trace. Intrigués par cette mystérieuse « désintégration », la seconde à se dérouler dans la péninsule gaspésienne, François, Paul et Eksk-Hiz, la fille dépigmentée du chef des extraterrestres d’Err-Hêt, décident d’enquêter.
Épaulé par les dirigeants d’Err-Hêt, hommes verts qui vivent sur une lointaine planète, le trio se renseigne d’abord sur les vaisseaux fantômes et le Triangle des Bermudes. Puis il gagne la Gaspésie, aux abords du village où les bateaux se sont volatilisés par temps clair. Les agents d’Err-Hêt poursuivent leur enquête sur place, sans rien remarquer d’insolite. L’un des villageois finit par leur parler d’une menace qui surgit du fond des eaux et qui, quand les flots sont tranquilles, tourne trois fois autour des navires avant de les avaler d’un seul trait. Le pêcheur supplie les émissaires des hommes verts de ne pas investiguer davantage, sous peine de disparaître à leur tour.
Mais les deux jeunes hommes et Eksk-Hiz sont déterminés à résoudre ce mystère. Ils naviguent donc sur le Saint-Laurent jusqu’à ce que leur embarcation se désintègre. Désormais privé de corps, le trio traverse l’espace jusqu’à une lointaine planète. Il assiste alors à l’étrange rituel d’hommes gris, dont les chairs purulentes se détachent des os. Sitôt que les habitants de cette vallée désolée entrent dans une immense machine, leur peau redevient saine. En interrogeant les malades, François, Paul et Eksk-Hiz apprennent que les moribonds approvisionnent la machine à l’aide de chair animale qui provient d’outre-espace. Mais il y a eu une erreur dans les circuits, et des corps humains ont été utilisés par mégarde pour régénérer les « morts-vivants »…
Avec les Ains-O-Liths, nos agents parviennent à remédier au problème et à retrouver leur corps. Ils retournent ensuite sur Terre, en Gaspésie, où François et Eksk-Hiz vivent en quelque sorte leur voyage de noces, tandis que Paul rencontre une jeune femme blonde…
Commentaires
Troisième aventure de François, Paul et Eksk-Hiz, Le Piège à bateaux allie science-fiction et fantastique en un amalgame qui n’est pas toujours heureux. Les deux premiers tiers du livre, les plus réussis grâce à l’atmosphère mystérieuse qui y règne, se trament sur Terre, plus précisément en Gaspésie. La quête du trio, qui s’attarde à quelques pistes énigmatiques (les vaisseaux fantômes, le Triangle des Bermudes…), n’est pas inintéressante. Mais le dernier tiers du Piège à bateaux, qui prend pour cadre une lointaine planète grise et dévitalisée, manque d’originalité. C’est à cet endroit que vivent en quelque sorte des zombies, dont l’aspect terrifiant aurait significativement gagné à être mis de l’avant pour accentuer la tension dramatique du récit, en l’état plutôt inexistante.
De même, la « traversée » de l’espace, qui aurait pu constituer un moment clef de l’histoire, s’étire en longueurs un peu verbeuses : « Le trio se dirige toujours à travers l’espace, mû par cette force mystérieuse qui, peut-être, les [sic] entraîne vers leurs [sic] corps dont ils [sic] ignorent tout. Un pari ! Un étrange pari avec l’inconnu ! Un pari dans lequel ils ont tout à gagner ! Si vraiment, comme ils l’espèrent, cet attrait irrésistible les conduit à leurs corps, alors ils auront gagné de retrouver la vie… […] Non, rien à perdre dans ce pari ! D’ailleurs, avaient-ils vraiment le choix ? » (p. 70).
De plus, l’auteur n’a visiblement pas perdu son goût pour les noms peu inspirés : après les Akk-Thiph et Eksk-Hiz du tome 1 (La Mystérieuse Boule de feu), il crée maintenant les Ains-O-Liths… Cet aspect pourrait sans doute être excusé si les personnages en question étaient plus élaborés : pauvre Paul, surtout, déjà falot dans les tomes précédents, il est carrément translucide dans celui-ci !
Mais l’aventure mise en place par Louis Sutal est en général rythmée, nos agents de l’espace ne chômant pas. En outre, la touche gaspésienne du récit, avec les sorties en bateau de pêche et l’achat de pain ménage cuisiné dans la région, confère un côté amusant à ce roman sans prétention, qui ne s’embarrasse pas de vraisemblance, notamment en ce qui concerne le fonctionnement de la machine régénératrice des zombies.
Dommage aussi que l’écriture soit inégale, saturée de points d’exclamation, et, dans une moindre mesure, de points d’interrogation et de suspension, l’exemple suivant donnant le ton : « Viennent la Voie lactée, Pluton, Neptune, Uranus, Saturne, Jupiter et Mars… Puis la Terre ! Enfin ! Le Québec !… … La vallée du Saint-Laurent… … Le golfe… … L’eau à perte de vue… … Et sous eux […] une barque et trois corps… Leurs corps ! Les corps de Paul, de François et d’Eksk-Hiz ! Sauvés ! » (p. 120-121).
Bref, Le Piège à bateaux est un roman qui vise à divertir un jeune public et qui ne le fait pas toujours avec un bonheur égal. Mais il a de quoi faire rêver de toutes ces disparitions de navires inexpliquées en haute mer, de ces bateaux fantômes que charrient les tempêtes, lorsqu’elles le veulent bien… [AG]
- Source : Les Années d'éclosion (1970-1978), Alire, p. 385-387.
Références
- Lortie, Alain, Requiem 19, p. 17.