À propos de cette édition

Éditeur
Pierre Tisseyre
Genre
Fantastique
Longueur
Roman
Format
Livre
Pagination
228
Lieu
Saint-Laurent
Année de parution
1997
ISBN
9782890516571
Support
Papier

Résumé/Sommaire

Octave est musicien, pauvre et inconnu. Rêve, son rêve, en est un de gloire et de richesse. Caline, sa compagne, les suit avec amour et une certaine résignation. Ils décident tous trois de se rendre en ville, lieu plus propice à la gloire. Là, ils rencontrent Émile, un écureuil intelligent et qui parle. Rêve est allé se promener sans son rêveur, ce qui est inhabituel. Il rencontre ainsi le directeur des rêves, qui veut s’occuper lui-même de son cas. Apitoyé par l’histoire d’Octave transmise en images frappantes par Rêve, il lui donne un catalyseur de circonstances qui aidera Octave à obtenir ce qu’il désire. C’est fait lorsqu’Ulric, gérant d’artistes à succès, entend Octave chanter devant un grand magasin et l’envoie chercher par son assistant.

Entre temps, nous faisons la connaissance d’Iris et d’Ésérine, des anges-cupidons voués aux amours humaines. Ésérine est en pleine révolte luciférienne contre Dieu et son travail. Pour la manifester, il frappe d’une flèche amoureuse Caline, qui se promène toute seule, et un inconnu totalement incompatible avec elle. Après avoir cédé sans comprendre ce qui lui arrive aux avances de l’inconnu, Homéo, Caline retourne chez elle, bien décidée à ne pas en parler à Octave qui, de toute façon, prône l’amour libre. Octave commence son ascension vers la gloire et apprécie fort richesses et honneurs, tandis qu’Ulric réalise enfin son rêve d’artiste frustré par personne interposée.

Cependant, Dieu, fort satisfait du vilain travail d’Ésérine, décide de lui donner le rôle du Diable (lequel n’existait pas avant lui, c’était seulement une invention humaine). Ésérine prend ce rôle au sérieux et s’acharne en particulier sur Rêve, toujours séparé de son créateur et qui a obtenu lui aussi ce qu’il désirait, c’est-à-dire l’incarnation. Ce doit être l’homme pur qui, second messie, sauvera la race humaine une seconde fois, mais Ésérine ne le rate pas. Pas plus que Caline, capturée par un Homéo amoureux littéralement fou, qui l’enferme à vie dans un cagibi pour la garder avec lui. Quant à Octave, il part pour une grande tournée à l’étranger, oublieux de Rêve, de Caline et d’Émile (qui meurt dans une voiture conduite par un aveugle) : Octave est parti pour la gloire, et pourri comme la gloire…

Commentaires

On aura compris, j’espère, à ce résumé, qu’il ne s’agit pas d’un roman réaliste. De quoi s’agit-il ? D’une fantaisie reposant moins sur les péripéties, finalement, que sur la verve langagière : jeux de mots, contrepèteries, prises de termes au pied de la lettre prolifèrent dans tous les azimuts ; c’est là qu’est à l’œuvre la déréalisation fantastique. L’auteur a fait une carrière musicale, ce qui lui a sans doute donné son sujet et les indignations convenues de ses personnages (le personnage d’Ulric, par exemple, est sorti tout droit de Starmania) ; mais il a aussi fait des études en lettres : peut-être a-t-il rencontré les œuvres de Boris Vian quelque part en chemin et ne s’en est-il jamais remis. Il n’a malheureusement pas le doigté de Vian, et l’indigestion littéraire a pointé son nez pour cette lectrice dès la page 25 d’un livre qui en compte 228. Trop, c’est trop et, en l’absence de contraste, les trouvailles linguistiques finissent vite par s’étouffer les unes les autres – elles sont d’ailleurs loin d’être toutes de la même qualité, les trois quarts étant des allitérations ou détournements de mots faciles, voire douteux parfois (exemple du pire : « le grand Horgh Anh Zenithal, chef spirituel du monde onirique ») ; c’est dommage pour les bonnes trouvailles réellement amusantes ou poétiques perdues dans cette mélasse.

Heureusement, la maîtrise narrative est au rendez-vous : nous suivons les pérégrinations des divers personnages en des petites vignettes assez courtes, pourvues d’un titre, et l’histoire bien construite roule sans cahots. L’inventivité délirante, si elle est au rendez-vous à chaque paragraphe, ne détourne jamais la narration de son but, et le style est également à la hauteur (avec, par exemple, un usage systématique et adéquat de l’imparfait du subjonctif à effet comique aux autres personnes que la troisième du singulier, le seul effet apparemment qu’il puisse encore obtenir aujourd’hui, avec quelques oublis ici et là, qu’on pardonnera).

Ce roman a gagné le Prix littéraire Pierre Tisseyre. Pourquoi pas ? Relève-t-il des genres normalement recensés dans L’ASFFQ ? Pourquoi pas non plus ? Je dirais dans la catégorie fantaisie moderne, et même avec un petit goût de patente gonflée jusqu’à la grosse farce, très québécois me semble-t-il si l’on se réfère à l’histoire littéraire de cette sous-catégorie dans les années 60 et 70 (je pense à Emmanuel Cocke, à Marcel Moussette…). [ÉV]

  • Source : L'ASFFQ 1997, Alire, p. 76-77.

Prix et mentions

Prix littéraire Pierre-Tisseyre 1997

Références

  • Campion, Blandine, Le Devoir, 06/07-12-1997, p. D 4.
  • Fortin, Marie-Claude, Lettres québécoises 90, p. 16-17.
  • Martel, Réginald, La Presse, 23-11-1997, p. B 7.