À propos de cette édition

Éditeur
Paulines
Titre et numéro de la série
Neubourg et Granverger - 8
Titre et numéro de la collection
Jeunesse-pop - 72
Genre
Hybride
Longueur
Recueil
Format
Livre
Pagination
105
Lieu
Montréal
Année de parution
1990
ISBN
9782890394827
Support
Papier
Illustration

Résumé/Sommaire

[4 FA ; 5 HG]
La Vieille Agathe
Les Ruines de Tirnewidd
Dans le logis d'Agathe
Le Bourreau de Granverger
Agathe connaît bien des choses
Le Coffret
Agathe connaît bien des gens
La Fresque aux trois démons
Le Masque d'Agathe

Commentaires

Si, un jour, l’œuvre de Daniel Sernine fait l’objet d’une édition critique, ses exégètes auront de quoi s’amuser et pourront exiger une grosse subvention des organismes gouvernementaux pour établir les différentes variantes de son œuvre. Car un texte de Sernine, une fois publié, n’est jamais définitif et circule sous diverses versions. Il a entrepris depuis quelques années de rajeunir les textes fantastiques qu’il a écrits au cours des années soixante-dix pour les remettre en circulation dans des revues québécoises et européennes.

Quatre destins s’inscrit dans cette démarche puisque les quatre récits que contient ce livre destiné aux jeunes ont déjà été publiés dans une version légèrement différente. « Les Ruines de Tirnewidd » a été tiré du recueil Légendes du vieux manoir tandis que « Le Bourreau de Granverger », « Le Coffret » et « La Fresque aux trois démons » figurent au sommaire de Contes de l’ombre. Les deux derniers textes ont même été publiés initialement dans Requiem.

Afin de donner une certaine unité à l’ensemble, Sernine a utilisé le personnage de la vieille Amérindienne et l’a investie d’un rôle de conteur oral. Ce faisant, l’auteur reprend une formule qui a fait les beaux jours de la littérature québécoise au siècle dernier avec des maîtres conteurs comme Jos Violon et le père Michel, notamment. Pour faire les liens entre les différents récits, Sernine a écrit de courts textes intercalaires comme il l’avait fait précédemment dans un recueil de nouvelles fantastiques paru en 1983, Quand vient la nuit. C’est donc dire que la portion inédite de Quatre destins représente seulement 16 % environ de l’ouvrage.

Néanmoins, le livre ne souffre pas de ce travail de remodelage car tous ces textes s’inscrivent dans ce qu’il est convenu d’appeler « le cycle de Neubourg et Granverger ». En outre, les lecteurs auxquels s’adresse ce livre n’ont sûrement pas eu l’occasion de lire ces nouvelles auparavant. Tout au plus, ce nouvel agencement de textes oblige-t-il parfois l’auteur à changer le point de vue narratif. Ainsi, dans « Les Ruines de Tirnewidd », il doit délaisser le “je” – le narrateur était Ludovic Bertin, le fils de Philippe Bertin – au profit du “il”. La plupart du temps, Sernine en profite pour alléger l’écriture et raccourcir certaines phrases. Par contre, dans « Le Bourreau de Granverger », sans qu’on sache pourquoi, le nombre de spectres, qui était de 25 dans la version initiale, passe à 30. Oui, les exégètes de Sernine vont se régaler dans 50 ans !

Les textes fantastiques qui composent Quatre destins appartiennent à la veine traditionnelle de l’auteur. Cette allégeance au fantastique canonique, accentuée par l’utilisation d’un conteur privilégié, empêche Sernine de prendre ses distances avec cet héritage littéraire. Il était encore trop rempli de respect pour ce genre à l’époque où il a écrit ces textes pour essayer d’en renouveler les thèmes. Sernine se contente de coller aux schèmes de pensée de cette société conservatrice. Son fantastique fait appel aux grandes orgues et puise à même les préoccupations religieuses de l’époque qui sont en quelque sorte garantes des manifestations du mal.

Elles sont encore crédibles parce que cette société existe en fonction du combat qui oppose les forces du Bien aux forces du Mal. La notion de justice immanente y est encore bien présente comme en témoigne la fin tragique de Benjamin Vignal qui doit répondre de ses actes devant les marins qu’il a exécutés trente ans plus tôt. Dans « Les Ruines de Tirnewidd », c’est le sens du sacré et le respect dû aux morts qui sont valorisés. Les deux autres nouvelles explorent des mythes qui sont plus universels. « Le Coffret » constitue une version rajeunie de la boîte de Pandore qui renferme tous les maux de l’humanité. Cela m’a permis d’apprendre que Pandore était une femme et non un homme comme je le croyais. « La Fresque aux trois démons » propose une adaptation du mythe de Faust alors que Philippe Frégeau vend son âme aux forces du mal en échange du génie de la peinture.

Le dénominateur commun de ces récits, c’est la culpabilité. Ce sentiment, secrété par la société rigide et conformiste du siècle dernier, représente le moteur indispensable de ce fantastique canonique lourdement hypothéqué par l’héritage de la civilisation judéo-chrétienne.

Lire Quatre destins pour les lecteurs de ma génération, c’est un peu beaucoup revivre les premiers moments de la carrière de Daniel Sernine et mesurer le chemin parcouru depuis une quinzaine d’années par cet écrivain dédié au fantastique et à la science-fiction. [CJ]

  • Source : L'ASFFQ 1990, Le Passeur, p. 177-179.

Références

  • Anonyme, Vidéo-Presse, vol. XX, n˚ 9, p. 52.
  • Anonyme, Vie pédagogique 72, p. 28-29.
  • Chantelois, Mathieu, La Presse, 01-12-1991, p. A14.
  • Demers, Dominique, Le Devoir, 14-012-1991, p. D-9.
  • Fournier, Sylvie, Lurelu, vol. 14, n˚ 1, p. 16.
  • Larocque, François, Québec français 82, p. 98.
  • Le Brun, Claire, imagine… 57, p. 93-94.
  • Sarfati, Sonia, La Presse, 31-03-1991, p. C3.