À propos de cette édition

Éditeur
L'Action nationale
Genre
Science-fiction
Longueur
Courte nouvelle
Paru dans
L'Action nationale, vol. LVI, n˚ 4
Pagination
380-383
Lieu
Montréal
Année de parution
1966

Résumé/Sommaire

D’éminents savants canadiens projettent d’envoyer dans l’espace des astronautes dont la tâche consisterait à explorer la ceinture d’astéroïdes qui se situe entre Mars et Jupiter. La faible attraction à la surface de ces « petites planètes » rend toutefois la mission hasardeuse : bien que les scientifiques aient trouvé une façon de contourner la difficulté, encore faut-il qu’ils s’assurent de l’efficacité de leur dispositif. On publie donc une annonce afin de trouver des volontaires prêts à risquer leur vie. Les candidatures sont nombreuses. On finit par choisir un célibataire francophone, « poète de métier » et spécialiste de Shakespeare, ainsi qu’une trentenaire polyglotte de Winnipeg. Les deux astronautes apprennent à se connaître au cours du périple. Arrivés à destination, ils découvrent un corps céleste inconnu. Ils se rendent compte que cette planète est habitable et décident d’abandonner leur mission pour s’établir ensemble dans ce paradis retrouvé.

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Commentaires

« Le Rendez-vous dans l’espace » est une drôle d’histoire ; on se demande où l’auteur veut en venir avec cette romance à l’eau de rose sur fond de conquête de l’espace. Une chose est cependant claire dès la première lecture : Tétreau cherche manifestement à illustrer un point de vue. Cette nouvelle s’inscrit dans une quadrilogie intitulée Contes en forme de médaillons, qui porte très bien son nom car c’est bien à la rhétorique du conte qu’appartient cette fiction à visée didactique.

On ne lit évidemment pas une nouvelle comme celle-ci pour admirer la virtuosité du verbe de l’écrivain ou encore pour apprécier la complexité du monde fictif qu’il construit. Tétreau fait la belle part au techno babble sans pour autant construire quelque chose qui pourrait ressembler à un véritable récit de SF. L’intérêt réside donc ailleurs, mais encore faut-il savoir reconnaître le message encrypté dans la fiction.

À vue de nez, cela pourrait constituer un bon plaidoyer pour l’unité canadienne ; une anglophone et un francophone qui refont leur vie ensemble dans un nouveau paradis terrestre : la métaphore est facile à interpréter en ce sens. Le texte a toutefois été publié dans L’Action nationale, une revue à forte tendance nationaliste, ce qui rend cette interprétation un peu plus difficile à accepter. Risquons donc une seconde hypothèse : ces scènes de bonheur conjugal, où un couple (constitué d’une femme mariée et mère de famille et d’un poète célibataire) voyage dans l’espace comme au Club Med, pourraient constituer une belle vitrine pour les valeurs en émergence dans les années soixante : liberté de choisir son destin hors des contraintes établies par l’usage commun ou la morale, retour à la nature, amour libre…

Mais j’avoue avoir de la difficulté à comprendre comment L’Action nationale aurait pu accepter de faire paraître un texte qui prône l’infidélité ou l’union libre. De telles valeurs ne cadrent pas très bien avec l’arrière-plan idéologique de la revue, principal organe de la droite traditionaliste québécoise. Peut-être s’agit-il en fait d’une nouvelle qui tire dans tous les sens si bien que le lecteur peut y projeter sa propre utopie. Il faut dire que la distance temporelle et idéologique qui nous sépare de cette époque rend probablement le message plus difficile à faire passer.

Je laisse à ceux qui voudront aller lire la nouvelle le soin de trouver la clef du mystère : entre amour libre et unité canadienne, je vous laisse donc choisir… [ID]

  • Source : La Décennie charnière (1960-1969), Alire, p. 182-184.