À propos de cette édition

Éditeur
UNEQ
Genre
Fantastique
Longueur
Courte nouvelle
Paru dans
L'Unique, vol. 1, n˚ 2
Pagination
5
Lieu
Montréal
Année de parution
1998
Support
Papier

Résumé/Sommaire

D’abord, le verglas. Puis la sécheresse et les feux de forêt. Les arbres deviennent si rares qu’ils sont déclarés biens du patrimoine national. Interdiction absolue de les abattre pour fabriquer du papier. Alors le poète, faute de pouvoir coucher ses mots sur le papier, dépérit et s’étiole. Quelqu’un offre sa peau pour qu’il y écrive sa poésie.

Commentaires

La crise du verglas au Québec au début de l’année 1998 a déjà inspiré plusieurs écrivains. On aurait pu craindre le pire avec un début de texte comme celui-là : « Il y a eu d’abord la tempête de verglas où presque tous les arbres ont été touchés. » Mais Claude-Emmanuelle Yance surmonte cette amorce de récit et se sert de cet événement qui a marqué l’inconscient collectif québécois pour faire décoller le texte et l’arracher des ornières du témoignage vécu et de l’étude psychologique où il aurait pu s’enliser.

« Rêve d’arbre » aborde la relation de l’écrivain avec le papier et les mots comme si ceux-ci ne pouvaient vivre sans le support de la feuille blanche. On le voit, le texte de Yance n’est pas réaliste car l’absence de papier ne saurait empêcher un poète d’écrire sur un écran d’ordinateur. L’auteure dénie ici tout usage de l’écran cathodique comme substitut du papier.

Il y a de la part de la narratrice (ou peut-être du narrateur, on ne sait – et cela contribue à la richesse du texte que de ne pas connaître l’identité du « je ») une très belle générosité quand elle/il offre sa peau comme feuille de papier aux mots du poète. Ce rapport aux mots, décrit comme une relation sensuelle, rend compte de l’intimité propre à l’acte d’écrire. Cependant, l’intimité ne se suffit pas à elle-même et il y a aussi urgence de communiquer avec le monde. C’est pourquoi la narratrice/le narrateur aspire à devenir arbre pour multiplier les mots de l’écrivain et les rendre aux lecteurs.

Ce très beau texte court, poétique, qui évoque le thème de The Pillow Book, le film de Peter Greenaway, est porté par une aspiration vers le haut de la même façon que la cime d’un arbre s’élève vers le ciel. [CJ]

  • Source : L'ASFFQ 1998, Alire, p. 190-191.