À propos de cette édition

Éditeur
Stop
Genre
Fantastique
Longueur
Nouvelle
Paru dans
Stop 145
Pagination
n. p. [18 pages]
Lieu
Montréal
Année de parution
1996
Support
Papier

Résumé/Sommaire

Après avoir roulé pendant des heures et emprunté de nombreux détours imprévus, un homme doit abandonner sa voiture. Le voilà complètement perdu, en pleine nuit, dans une campagne anonyme. Heureusement qu’un étranger, qui promène son chien aveugle, l’aide à retrouver son chemin… ou plutôt à l’enfoncer encore plus dans l’inconnu. Quand l’homme trouve enfin quelques traces de civilisation en entrant dans un petit village, il se croit au bout de ses peines… Mais les habitants agissent de façon étrange, comme si le temps n’existait pas, prenant des décisions irrationnelles et parfois même dangereuses pour eux-mêmes et les autres. Surtout lorsque l’église du village brûle (et ce, à plusieurs reprises puisque les événements se répètent sans fin dans cet endroit, tels des échos) et que personne ne fait rien… tant que Ricky n’a pas appelé.

Qui est ce Ricky ? Le nouveau venu tente de le découvrir, en vain. Il finira par se réveiller dans un lit d’hôpital, croyant que toute cette mésaventure n’était qu’un mauvais rêve… jusqu’à ce que l’infirmière lui annonce qu’un certain Ricky a appelé pour prendre de ses nouvelles.

Commentaires

Cette histoire très mystérieuse ne répond pas aux règles de la logique, de la pensée rationnelle, mais à ses propres règles : celle du rêve, de l’étrange qui dépayse habillement le lecteur en le plongeant dans l’inconnu. Un inconnu qui, pour le personnage principal, possède d’abord un arrière-goût de déjà-vu, d’inquiétante étrangeté freudienne puis rapidement de boucle infernale, de continuel recommencement.

Avec cette nouvelle, l’auteur fait assurément référence

à la pièce de théâtre absurde En attendant Godot de Samuel Beckett, dans laquelle les personnages attendent longtemps un dénommé Godot (Dieu) qui n’arrivera jamais. Comme ce Ricky qui semble tout-puissant, un être mystérieux qu’il faut craindre, mais qu’on ne verra jamais. Parfois, il daigne appeler pour dicter ses ordres. Existe-t-il vraiment, ce Ricky (tout comme Godot ou Dieu) ? Certains personnages clament bientôt qu’il serait mort. D’ailleurs, une scène qui fait partie des éléments qui reviennent en boucle (celle dans laquelle l’église brûle, ce dont personne ne se préoccupe) reflète une claire indifférence face à la religion, à son déclin dans la vie des gens.

On peut également remarquer une structure narrative près du surréalisme et une ambiance tout près du rêve fiévreux qui rappelle les œuvres du cinéaste David Lynch. L’auteur réussit avec brio l’effet tant recherché par les amateurs de fantastique : cette déstabilisation, cette déroute vers le surnaturel, vers l’inexplicable. Grâce à son sens du suspense, mais surtout parce qu’il sait comment faire vivre une histoire plutôt que de simplement la raconter. En effet, les sens du lecteur, par l’entremise de ceux du personnage principal (un narrateur à la première personne), sont souvent interpellés : l’odorat, le goût, le toucher… Tout pour se glisser tête première dans ce cauchemar labyrinthique. [JR]

  • Source : L'ASFFQ 1996, Alire, p. 169-170.