À propos de cette édition

Résumé/Sommaire
Un mutant, Prom, a volé le feu du ciel mais, sur le chemin du retour, il se blesse sur un anneau de Saturne et échappe le feu qui se désagrège, s’étiole en une multitude d’étoiles. Résultat : l’hiver suivant, le froid tua les dieux.
Commentaires
Oublions les rimes faciles et l’apparente naïveté de ce conte bref qui se veut une réappropriation moderne du mythe de Prométhée pour analyser plus en profondeur ses interprétations sociales et politiques contemporaines. On qualifie ici le Titan du mythe originel de « mutant », le rapprochant ainsi de la créature non parfaite qu’est l’humain. Ce non-dieu, donc, dérobe du ciel (des dieux) le feu, c’est-à-dire l’intelligence et la connaissance faisant tant défaut à son espèce. Mais pourra-t-il garder ce savoir pour lui et quelques privilégiés ?
Le théologien Pierre Lacour, dans Sur l’influence morale, sociale et progressive du monothéisme, affirme que « le socialisme et le communisme ont fait comme Titan et Saturne, qui ne voulant pas souffrir d’autres héritiers du monde qu’eux, détrônèrent le Ciel, leur père, et le mutilèrent », et il n’est pas le premier à associer la figure de Saturne à des idées sinon toujours communistes, à tout le moins égalitaristes. Le Prom de notre conte, donc, se frotte à Saturne et « les tisons échappés devinrent comètes d’étincelles », c’est-à-dire que le savoir et la connaissance s’éparpillent parmi tous les hommes, que tous y ont accès. La conclusion de l’histoire de Gaétan Rochon est sans équivoque : « l’hiver suivant, tous les dieux moururent de gel ». L’homme n’a plus besoin, dans un système juste et équitable où tous ont accès au savoir, de figures d’autorité suprême, qu’elles soient divines, royales ou étatiques. Celles-ci ne peuvent que mourir, disparaître. [PT]
- Source : Les Années d'éclosion (1970-1978), Alire, p. 341-342.