À propos de cette édition

Éditeur
Triptyque
Genre
Fantastique
Longueur
Nouvelle
Paru dans
Chroniques du métro
Pagination
67-76
Lieu
Montréal
Année de parution
1992
Support
Papier

Résumé/Sommaire

Un homme, collectionneur de chaussures invétéré, raconte à une femme inconnue abordée dans le métro le malheur qui est le sien depuis qu’il a fait l’acquisition des baskets qu’il porte aux pieds. Il est désormais condamné à marcher sans relâche à travers la ville, sans espoir de repos. En dernier ressort, il demande à la femme de l’aider à se suicider en le poussant devant une rame de métro.

Commentaires

Quatorze ans après la parution du recueil Rue Saint-Denis, Chroniques du métro réaffirme l’importance de l’espace montréalais dans l’imaginaire littéraire de la nouvelle génération d’écrivains. Dans cette nouvelle qui constitue une variante du motif de l’objet maléfique comme dans plusieurs autres, Louise Champagne apparaît en effet comme l’héritière spirituelle d’André Carpentier.

« Les Souliers » raconte l’obsession d’un collectionneur de chaussures qui sera victime de sa passion. La nouvelle joue habilement sur une double identification. Les baskets que porte le personnage ont appartenu auparavant à un jeune homme mort d’épuisement parce qu’il était incapable de rester en place. Cette insatisfaction chronique trouve son contrepoint dans la figure mythique de James Dean dont la mort ressemble à un suicide. Or, la paire de baskets est identique à celle que portait l’acteur américain dans un de ses films.

Contrairement à Jean-Yves Soucy qui a déjà disséqué un cas de fétichisme en analysant la fixation d’un homme pour des bottes rouges dans « M. Thouin », Louise Champagne ne fouille pas la psychologie de son personnage. Que cache sa monomanie ? On n’en sait rien. Il apparaît évident toutefois que la fonction (l’utilisation d’espadrilles) crée le besoin (la marche).

Mais il y a un petit détail qui pourrait ne pas être anodin. Le compulsif collectionneur est écrivain. Son métier, qui consiste à collectionner des mots et à les agencer pour leur donner un sens, constitue une forme anodine d’obsession, tout en le prédisposant à son malheur. Ce travail intellectuel trouve tout naturellement son prolongement dans une activité physique incontrôlable. Il y a peut-être là une mise en garde contre la perte d’identité due à une fréquentation trop assidue du territoire de l’imaginaire, qu’il soit romanesque ou cinématographique.

Une bonne petite nouvelle, en somme, qui court inexorablement vers son dénouement sans que l’intérêt faiblisse. [CJ]

  • Source : L'ASFFQ 1992, Alire, p. 53-54.