À propos de cette édition

Éditeur
PUBLIQ
Genre
Science-fiction
Longueur
Novelette
Paru dans
Solaris 135
Pagination
9-36
Lieu
Beauport
Année de parution
2000
Support
Papier

Résumé/Sommaire

Cinq étudiants universitaires collaborent, dans le cadre d’un cours en littérature, à une création collective ayant pour titre Le Suicide de la Déesse. Le travail terminé, le groupe se sépare et chacun trouve sa voie personnelle. Quarante ans plus tard, le texte, qui a connu une diffusion confidentielle, a donné naissance à une secte, les Suicidistes, qui favorise la destruction de la planète. Le mouvement fait boule de neige à l’échelle mondiale et les attentats contre les humains et même contre la faune et la flore se multiplient.

Commentaires

Qu’est-ce qui fait que ce texte ne m’emballe pas ? Pourtant, l’idée de départ est intéressante et le sujet principal – la protection de l’environnement – toujours d’actualité mais la nouvelle s’étire indûment sans qu’il ne se passe grand-chose au fond.

Plusieurs thèmes – trop sans doute – se disputent l’attention du lecteur et sollicitent son empathie. Au premier chef, il y a cette conscience écologique qui veut nous alerter sur le danger que l’être humain fait courir à la planète en dilapidant les richesses qu’elle contient. L’auteur propose pour ce faire une séduisante théorie sur l’autodestruction en créant le mythe d’une Déesse (la Terre) qui se sacrifie pour nourrir son enfant (l’Homme), celui-ci devenant l’instrument de la destruction de la planète dont il est la créature.

La création du mythe donne naissance à un mouvement nihiliste, le Suicidisme, ce qui amène Simon Labelle à soulever le problème de la responsabilité des cinq étudiants en littérature face à leur création collective. Doivent-ils se sentir responsables du détournement de leur œuvre à des fins fanatiques et des malheurs qui sont survenus ? Surgissent alors les vieux clichés sur l’œuvre qui, une fois écrite, échappe à son créateur et sur le texte qui s’écrit de lui-même, comme dicté par une conscience qui dépasse le créateur.

La nouvelle fait la navette entre le passé et le présent, un intervalle de 40 ans. On comprend que l’auteur veut mesurer les effets psychologiques des événements sur les cinq protagonistes mais cette enquête de la narratrice Agnès, l’un des membres de la bande, ne suscite aucun intérêt. Elle est surtout prétexte à l’évocation d’un passé qui verse dans le romantisme et dans la nostalgie « du bon vieux temps », les brainstorming et la bohème étudiante prenant beaucoup de place.

Ce qui fait le plus problème dans cette nouvelle, me semble-t-il, c’est l’incapacité pour le lecteur de saisir réellement l’importance des événements qui sont racontés. Certes, la philosophie à la base du Suicidisme a entraîné des suicides collectifs importants mais au-delà des effets dévastateurs de ce mouvement, on ne connaît rien de l’état de la planète en matière de pollution alors que la réflexion qui a amené le groupe à rédiger Le Suicide de la Déesse avait comme élément déclencheur la prise de conscience de la pollution et de la destruction progressive de la Terre.

La prémisse de la nouvelle qui annonce, d’entrée de jeu : « Voilà, c’est à ce moment-là que le monde a chaviré », est ainsi contredite par la conclusion qu’on se doit de tirer de cette laborieuse démonstration. On n’a pas du tout l’impression que le monde a chaviré 40 ans plus tôt, et s’il a effectivement chaviré, cela s’est produit il y a bien plus longtemps. La nouvelle de Labelle, bien qu’elle fasse preuve d’une certaine recherche formelle en intégrant quelques poèmes, ne parvient pas à surmonter ce problème de crédibilité et, surtout, à nous convaincre de l’urgence dont elle se réclame. [CJ]

  • Source : L'ASFFQ 2000, Alire, p. 92-93.