À propos de cette édition

Langue
Français
Éditeur
Humanitas
Titre et numéro de la collection
Nouvelle optique
Genre
Science-fiction
Longueur
Roman
Format
Livre
Pagination
324
Lieu
Montréal
Année de parution
1987
Support
Papier

Résumé/Sommaire

J. W. Davidson, milliardaire américain et enfant du siècle – le XXe – va fêter son cent cinquantième anniversaire aujourd'hui et c'est le soir même, par un curieux hasard, que son cœur artificiel doit s'arrêter. En cette dernière journée, les souvenirs affluent dans la tête de celui qui s'est porté volontaire à dix-sept ans pour aller sauver une Europe ravagée par la Première Grande Guerre, qui a amassé une fortune dans le krach de 1929, qui fut l'un des organisateurs de la campagne présidentielle de Frank Delano Roosevelt, l'un des conseillers les plus appréciés de Teddy Kennedy lors de son mandat de l'an 2000. Il se rappelle sa première greffe du cœur, à la fin des années 80, au moment où se terminait la Troisième Guerre Mondiale, puis de la deuxième, et de la troisième, alors qu'il avait 125 ans, où il avait hérité du cœur de Clémence Frémont, une jeune syndicaliste québécoise qu'il avait rencontrée par hasard. Ensemble, ils avaient visité le Grand Nord Canadien, et Cancoque. Là, ils avaient découvert que des chercheurs en biologie génétique avaient créé en secret une race de sous-hommes, les Pnaumes. Tout d'abord commandés par l'Armée Canadienne afin d'avoir une réserve de soldats dociles pour garder la frontière du nord, les Pnaumes avaient dégénéré en esclaves et donneurs d'organes. Mais bientôt l'existence des Pnaumes devient publique. Déjà, les Russes savent et tentent d'influencer la direction des événements. Clémence, apitoyée sur le sort de ce sous-peuple, veut les aider malgré la volonté contraire des dirigeants. Désespérés par leurs conditions atroces de matériels vivants, les Pnaumes protestent, demandent qu'on respecte leurs droits. En vain. L'opinion publique est alertée et le gouvernement canadien crée une Commission d'enquête chargée de faire la lumière sur ces revendications et les infiltrations soviétiques. Il y aura une tentative de rébellion qui sera jugulée radicalement et Clémence ne s'en sortira indemne que difficilement. Mais des asociaux lui font un mauvais parti et, mourante, elle lègue son cœur à Davidson. [JPw]

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Commentaires

Il est difficile de résumer un tel roman qui tient autant du traité historique que du pamphlet politique, tous deux bien sûr conjugués au futur. Michel Solomon, dans cette brique de plus de trois cents pages, se vide le cœur sur un paquet de sujets, passant allègrement de l’indépendance du Québec et de son légendaire L’archevêque aux relations entre les deux grands, des problèmes du tiers-monde au danger de la recherche en biologie génétique, des grands mouvements sociaux du début du XXIe siècle aux progrès de la science dans le domaine de la pollution.

Difficile de résumer, donc, mais aussi difficile à ingurgiter. Car si on parle Histoire dans ce bouquin, c’est d’une Histoire à venir dont on ne sait rien. Alors, la masse d’information… Qui plus est, l’auteur en profite pour régler nombre de comptes avec la société moderne telle que nous la connaissons – n’oublions pas que son personnage est né en 1900 bien que l’histoire se passe en 2025 et en 2050 ! – et cette volonté apporte parfois des anachronismes qui entament joyeusement la crédibilité de l’anticipation.

Solomon a, de plus, opté pour un cadre statique – le vieil homme qui revoit son passé – propice aux réminiscences certes, mais inadapté à son propos historique puisqu’il l’oblige à donner sa matière informative en larges blocs indigestes et rapidement ennuyeux malgré l’écriture alerte et un certain sens de l’humour qui m’a cependant agacé royalement. Qu’on allège, c’est une chose, qu’on tourne en dérision son propre sujet, c’en est une autre.

Pour en revenir au cadre de départ, je pense qu’il eut été plus approprié de scénariser une intrigue principale plus dense, ce qui aurait permis de diluer un peu les séquences explicatives. C’est d’ailleurs ce que fait Michel Solomon dans la principale partie de son roman en présentant une intrigue secondaire – mais n’en devient-elle pas première du fait de son importance, plus des deux tiers du roman ? – qui tempère et rythme un peu plus le flot informatif.

À trop vouloir en mettre, on finit par décourager, et c’est ce sentiment qui s’empare du lecteur au bout de la première heure de lecture. Michel Solomon, s’inspirant de certains illustres disparus tels Huxley, Werfel et autres Pérochon, a voulu faire œuvre de création en dépeignant un futur plus ou moins apocalyptique. Si l’intention est bonne, la manière employée l’est moins, non pas par manque de talent – l’auteur a su faire ses preuves et de belle façon avant ce roman – mais bien par manque d’expérience dans ce genre d’écriture éminemment difficile qu’est la création de mondes. L’accumulation de détails et de faits définit peut-être l’Histoire, elle ne fait pas le roman. L’art de l’anticipateur touche au choix des événements rapportés et, surtout, à la façon dont il les présente au lecteur. Aux trois auteurs mentionnés plus haut, opposons un autre grand anticipateur dernièrement décédé, René Barjavel. Qu’on se rappelle son Ravage, décrivant une civilisation future aux prises avec la disparition de l’électricité et on comprendra ce que je veux dire.

Heureusement, Michel Solomon écrit bien et c’est cette facilité à aligner des phrases claires et concises qui sauve La Troisième greffe du cœur du ratage complet. Tel qu’il est, ce livre n’est donc pas à la hauteur du talent de Michel Solomon. C’est dommage, puisqu’il y avait là matière à œuvre importante. [JPw]

  • Source : L'ASFFQ 1987, Le Passeur, p. 167-169.

Références

  • Éthier-Blais, Jean, Le Devoir, 30-01-1988, p. D-8.
  • Gervais, Jean-Philippe, Solaris 78, p. 37-38.
  • Melançon, Christiane, imagine… 45, p. 85-87.
  • Soulié, Jean-Paul, La Presse, 19-03-1988, p. J 4.