À propos de cette édition

Éditeur
Stop
Genre
Science-fiction
Longueur
Nouvelle
Paru dans
Stop 148
Pagination
n. p. (9 pages)
Lieu
Montréal
Année de parution
1996

Résumé/Sommaire

Alors qu’il termine son quart de travail, un détective reçoit un appel. Une cliente, dont le mari a péri de façon douteuse – écrasé sous une presse à cause d’une indigestion de poutine, semble-t-il –, tout juste sortie de l’hôpital psychiatrique où elle a séjourné à la suite de cet événement, désire le voir immédiatement. Voici son histoire. Son mari Albert, un grand chercheur en fin de carrière, se consacre à la téléportation. Après avoir malencontreusement fait disparaître sa belle-mère, puis avoir réussi l’expérience avec un cendrier, il décide de se téléporter lui-même. Malheureusement, sa femme oublie un tue-mouche dans la cabine de départ… Les atomes de l’homme et de l’objet se mélangent, et à l’un il ne reste plus d’humain que la tête, le reste n’étant qu’une longue tige tordue. Son compagnon d’infortune, pour sa part, se retrouve avec le corps du mari, sauf la tête. Pratique quand on veut baiser avec quelqu’un sans caractère… Mais qui est qui ?

Commentaires

Toute la partie consacrée à la téléportation, ainsi que ses résultats, est narrée par le détective dans un récit enchâssé qui rapporte les paroles de sa cliente. Cette histoire en est-elle vraiment une de science-fiction ? Lorsque la femme raconte ses galéjades, nous sommes portés à croire qu’elle fabule. Or, il n’en est rien puisque l’égrillard limier corrobore ses dires en affirmant qu’il a vu le mari-tue-mouche, lequel était tel qu’il l’avait imaginé. En effet, alors qu’il se trouvait au lit avec la somptueuse blonde, ce dernier a fait irruption dans la chambre l’arme au poing, et le tout s’est soldé par sa mort. Science-fiction, donc. Et bien que le poids de la science-fiction semble assez léger, quelques marqueurs du genre, tels la téléportation par le biais d’une machine, le dérèglement des lois physiques qui donne naissance à deux nouveaux êtres puisque métamorphose il y a, sont bien présents.

Avec son ton « désolé poupée », le récit de Claude Mayrand ressemble, il faut bien le dire, davantage à un film de série B ou à un polar de gare à deux balles. À telle enseigne que la paralittérature, qui y squatte la littérature, est empreinte d’un kitsch issu de la culture de masse. Mais bien sûr s’agit-il là de l’effet recherché. Peut-être y voit-on poindre, aussi, l’influence d’une certaine bande dessinée tracée à grands traits. Il s’agit, en quelque sorte, d’une longue digression avec ses apartés, ses décrochages, et bien évidemment son humour particulier. Parfois amusant mais le plus souvent tiré par les cheveux (mais ça aussi, c’est voulu), cet humour est le fait d’un narrateur-enquêteur trivial et libidineux, le héros d’un vaudeville érotico-policier.

Certains diraient que « Le Tue-mouche » est un peu trop fabriqué, tandis que ses amateurs feraient observer que c’est là un choix esthétique, le résultat d’une surcomposition. En effet, en saturant sa matière, l’écrit, de loufoqueries, de gaudriole et de rebondissements en tous genres, le vaudevilliste en vient à meubler l’espace et le temps. Mais c’est lassant à la longue. J’en veux pour preuve, pour n’en révéler qu’une, le deuxième paragraphe que le narrateur consacre à nous expliquer pourquoi il porte une arme. L’ex-mari d’une cliente qu’il avait suivi, nous dit-il, l’avait menacé de le couper en rondelles et de le remonter en inversant certaines pièces… Ou encore – tiens, lançons-nous finalement – cette troublante tirade de la poutine évoquée supra, qui vient à l’esprit du perspicace détective : « Vous êtes la seule dans la région qui mangez de la poutine extra pepperoni, salade, mayonnaise, bœuf haché, omelette, piment, mélasse ». Quoi qu’il en soit, que l’on aime ou pas, en guise de science-fiction – puisque tel est le propos en ces pages –, ça se tient. [MN]

  • Source : L'ASFFQ 1996, Alire, p. 140-141.