À propos de cette édition

Langue
Français
Éditeur
Québec/Amérique
Titre et numéro de la collection
Littérature d'Amérique
Genre
Fantastique
Longueur
Roman
Format
Livre
Pagination
177
Lieu
Montréal
Année de parution
1991
ISBN
9782890375499
Support
Papier

Résumé/Sommaire

Le narrateur, jeune poète, d’origine haïtienne mais élevé au Saguenay par des parents adoptifs, est invité, par son amante Madeline Duché, à passer huit jours en amoureux dans le manoir de l’oncle Rodrigue Duché, un ex-colonel en exil. Son manoir est situé au cœur de la Nouvelle-Angleterre.

Dès leur arrivée dans la mystérieuse demeure, une série d’incidents bizarres laissent présager que le séjour du jeune couple sera moins romantique que prévu : accueil brutal par des mercenaires armés à la solde de l’ex-militaire, réception mitigée de l’oncle en question, inquiétude sourde, inexplicable du narrateur qui fait, dès la première nuit, un cauchemar épouvantable, etc.

Dans les trois jours qui suivent, d’autres incidents, plus violents que ceux-là (chiens de garde mutilés, domestiques égorgés) confirment les craintes du “héros” et de son amie : il se passe des choses pas catholiques dans ce manoir. Rodrigue Duché serait-il l’objet d’une vendetta ? Quelqu’un voudrait-il exercer une vengeance aux dépens du militaire haïtien dont le passé brutal et peu reluisant fait surface au fil des conversations et des événements ?

Et puis, Madeline meurt dans des circonstances étranges. Meurtre ? Suicide ? Dès lors, de révélations en révélations, le narrateur découvre une partie de la terrible vérité sur ses origines, sur l’identité réelle de Madeline et sur ses rapports avec Rodrigue Duché.

Mais voilà que Madeline (est-ce bien elle ?) revient d’entre les morts, tue le garde du corps de Duché, avant de littéralement massacrer ce dernier. Puis, le cadavre vivant s’écroule pour de bon, non sans avoir au préalable déclenché un incendie qui détruit à tout jamais le manoir maudit dont le narrateur, au bord de la folie, s’enfuit de justesse !

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Commentaires

De tous les genres littéraires (ou paralittéraires…), le roman fantastique est celui qui est le plus subtil et le plus difficile à écrire car il nécessite l’absolue adhésion de son lecteur chez lequel l’auteur doit provoquer, sous peine de faillite, ce que les Anglo-Saxons appellent « the suspension of disbelief » ! Autrement dit, il faut que l’écrivain séduise son lecteur moderne, rationnel, logique, qu’il en arrive à vaincre ses résistances pour que celui-ci joue le jeu, embarque dans l’histoire malgré ses aspects étranges et surnaturels, pour mieux le piéger et le faire basculer dans l’horreur, pour mieux susciter le frisson d’angoisse qu’il cherche à créer.

Le problème principal de ce court roman (il y en a plusieurs et non des moindres), c’est qu’il n’a jamais réussi à me séduire ou à gagner mon adhésion… Je n’ai pas “embarqué” une minute dans ce “remake” maladroit du chef-d’œuvre d’Edgar Allan Poe, « La Chute de la Maison Usher ».

Oh certes, j’ai souri aux multiples allusions (peu subtiles, parfois) : Rodrigue Duché, alias Roderick Usher, Madeline Duché, alias Madeline Usher, le narrateur anonyme, témoin impuissant d’une tragédie dont il ne comprend pas grand-chose, la “malédiction” qui pèse sur le manoir et ses habitants, la mort de Madeline et sa “résurrection”, la mort de Duché aux mains de Madeline (comme dans la nouvelle de Poe), l’écroulement final du manoir qui se lézarde de toutes parts (la fissure !). Tout y est…

Seulement voilà, le texte de Poe est une nouvelle très dense dans laquelle l’ambiance cauchemardesque et claustrophobique, le climat de folie, de maladie et de mort sont les vedettes. Stanley Péan a gonflé la nouvelle pour en faire un roman, ce qui entraîne inévitablement d’importantes longueurs. Il faut attendre une centaine de pages pour qu’enfin il se passe autre chose qu’une scène de repas exotique ponctuée de termes haïtiens dont l’explication se trouve dans un glossaire situé en fin de volume. Le chef-d’œuvre de Poe est devenu un scénario ennuyeux de série B.

Pourtant, Stanley Péan sait raconter une histoire et certaines scènes (dont les érotiques…) sont très réussies. Mais un conteur n’est pas nécessairement un romancier et cette transposition à la sauce créole d’un univers anglo-saxon névrosé et puritain n’est pas très réussie. En ce qui me concerne, la greffe n’a pas pris. Le roman n’est pas très long mais j’ai dû m’y prendre à plusieurs reprises pour le terminer. Par devoir ! On peut se demander, par ailleurs, quelle lecture en ferait quelqu’un qui n’a jamais lu la nouvelle de Poe et qui est ainsi privé d’une bonne partie de ce plaisir intellectuel qui peut résulter de la parodie… Mystère ! [NS]

  


  

L’occasion était trop belle pour ne pas saisir la perche tendue par Norbert Spehner et ne pas enchaîner à la suite de sa critique avec mon propre commentaire. « Quelle lecture en ferait quelqu’un qui n’a jamais lu la nouvelle de Poe ? » se demande-t-il. J’étais, avant de lire Le Tumulte de mon sang, ce rare lecteur vierge, ce qui m’autorise à répondre au commentaire de Spehner et à le prolonger.

Il est vrai que le roman de Péan démarre lentement mais il faut comprendre qu’il s’agit d’un texte d’atmosphère dont la construction repose sur une accumulation de petits détails en apparence anodins mais qui trouvent leur justification dans le dénouement final. En aucun temps je n’ai eu l’impression que le sens du récit m’échappait parce que je ne connaissais pas la nouvelle de Poe. Par ailleurs, je ne pense pas que j’aurais pris plus de plaisir à lire le roman si j’avais connu la nouvelle.

À mon avis, le roman de Péan s’autosuffit complètement parce que s’il emprunte la trame générale de « La Chute de la Maison Usher », il la transpose dans une autre époque et, surtout, dans une autre culture. L’univers puritain décrit par Poe constitue une illustration parfaite d’un romantisme exacerbé qui n’a plus cours aujourd’hui comme l’a compris Francis Ford Coppola qui, en portant à l’écran le Dracula de Bram Stoker, a respecté l’esprit de l’époque où ce roman a été écrit. Le Tumulte de mon sang est une réinterprétation de l’archétype de Poe à la lumière de la culture populaire créole. Sur cet aspect, le roman de Stanley Péan est, selon moi, une réussite incontestable. Il s’en dégage une authenticité à laquelle contribue grandement le récit d’un conte populaire haïtien qui compose l’essentiel du chapitre 14 dont la formule rituelle – « Cric ! Crac ! Tim-tim ? Bois sec ! » – rappelle la manière de nos conteurs du XIXe siècle.

Mais fait plus important encore, Stanley Péan intègre à son récit les particularités des superstitions haïtiennes qui s’incarnent dans le vaudou. Il s’agit là d’une dimension essentielle qui, à la limite, n’a plus rien à voir avec le texte de Poe puisque le mobile du récit est complètement transformé. Le roman raconte la déchéance d’un homme, le colonel Rodrigue Duché, qui a vendu son âme pour exercer le pouvoir et se constituer une fortune colossale. Dès lors, c’est toute l’histoire politique de Haïti qui est mise en cause et dont l’auteur n’a de cesse de rappeler les événements tragiques et les multiples exactions qui se perpétuent encore de nos jours.

Plus qu’à Edgar Allan Poe peut-être, c’est à Jacques Stéphen Alexis, romancier haïtien, que Péan estime être redevable comme il le note dans sa postface. En citant plusieurs passages de l’œuvre de cet auteur qu’il a en haute estime, il enclenche à son tour une mécanique implacable. Quelle lecture ferait du Tumulte de mon sang quelqu’un qui aurait lu l’œuvre de Jacques Stéphen Alexis ? Pour ma part, de m’avoir amené à lire la nouvelle de Poe constitue déjà en soi une preuve que Stanley Péan, en écrivant ce roman, ne s’est pas livré à un exercice futile. Dans ces circonstances, la découverte de l’œuvre de son mentor littéraire ne peut que constituer une plus-value. [CJ]

  • Source : L'ASFFQ 1991, Le Passeur, p. 125-127.

Prix et mentions

Prix littéraire du CRSBP du Saguenay–Lac-Saint-Jean 1991

Références

  • Anonyme, Contact, printemps-été 1992, p. 22.
  • Anonyme, Progrès-Dimanche, 31-05-1992, p. C4.
  • Bélil, Michel, imagine… 62, p. 119-120.
  • Cloutier, Georges Henri, Solaris 108, p. 38-39.
  • Côté, Lucie, La Presse, 08-12-1991, p. C 7.
  • Forgues, Lynda, À l'affiche, mars 1992, p. 12-13.
  • Klaus, Peter, Dictionnaire des œuvres littéraires du Québec IX, p. 820-821.
  • Latulippe, Martine, Impact Campus, 10-12-1991, p. 21.
  • Ollivier, Dominique, Images, 19-12-1991, p. 21.
  • Rivard, Isabelle, Au fil des événements, 27-02-1992, p. 15.
  • Tremblay, Jean-Marc, Le Réveil du Saguenay, 07-01-1992, p. 6A-7A.
  • Tremblay, Marc, Le Réveil du Saguenay, 02-06-1992, p. 10A.