À propos de cette édition

Éditeur
imagine…
Genre
Science-fiction
Longueur
Nouvelle
Paru dans
imagine… 40
Pagination
29-38
Lieu
Montréal
Année de parution
1987
Support
Papier

Résumé/Sommaire

An 2021. Le Québec, qui a acquis son indépendance politique, est partenaire avec le Canada et la France dans l’établissement d’une colonie spatiale. Modèle de société égalitaire pour les femmes, la sous-colonie québécoise dénonce la modification d’un règlement adoptée par ses deux partenaires pour limiter l’accès de celles-ci à certains postes. Un accident regrettable lui donne raison.

Commentaires

« Un pas de plus » s’appuie principalement sur deux axes thématiques : l’implantation d’une colonie de l’espace et l’importance du rôle social de la femme dans l’économie spatiale. Dans un cas comme dans l’autre, l’auteur ne fait pas preuve d’originalité et n’approfondit pas son sujet.

On se serait attendu de Geoffrey Edwards, qui a une formation d’astrophysicien, qu’il tente à tout le moins de renouveler le thème des colonies aux points de Lagrange, thème surutilisé depuis dix ans, entre autres, dans la hard SF américaine. En utilisant simplement Lagrange comme emplacement spatial, il ne propose aucune nouvelle extrapolation scientifique.

Par ailleurs, le portrait d’une société québécoise qui accorde une place importante aux femmes manque de crédibilité. Cette représentation d’un Québec indépendant, partenaire économique important dans la colonisation de l’espace et modèle de société ouverte aux femmes, tient plus de la vision idéalisée de l’auteur que d’une analyse prospective faite à partir de la réalité actuelle du Québec et des autres pays concernés. Edwards aurait eu intérêt à situer son récit plus loin dans le futur pour le bien de sa thèse.

« Un pas de plus » étale des convictions teintées d’utopie fort simpliste et présente des situations complexes de façon réductrice. La thèse défendue par Geoffrey Edwards est remplie de bonnes intentions mais ne peut que susciter des sourires sceptiques. L’auteur, faute d’arguments logiques, fait preuve d’un tel prosélytisme qu’il dessert la cause du militantisme féministe, en exposant les situations décrites à la caricature. De même, l’image politique du Québec, pour flatteuse et encourageante qu’elle soit, semble destinée avant tout à regonfler le moral des troupes indépendantistes après l’échec du référendum.

On conçoit aisément que les personnages de cette nouvelle au fort contenu idéologique soient inexistants et confinés à des rôles de porte-étendard de diverses tendances : féminisme, machisme, technocratie. L’écriture n’aide pas à nous les rendre plus proches ou plus chaleureux. La narration utilise des procédés indirects et distants : rapports d’enquête, journal intime, extraits d’articles, lettres. On peut incidemment reprocher à Edwards une concession inutile à un certain réalisme en publiant en anglais un extrait du journal intime de Gregory Halen et d’un article de presse.

Les événements n’étant jamais racontés en prise directe, le lecteur ne se sent pas concerné. En outre, le style, strictement utilitaire, ne produit aucun effet poétique et atteint le degré minimum que l’écriture d’une fiction peut se permettre.

La bonne foi et la sincérité présumées de Geoffrey Edwards n’y peuvent rien : cette nouvelle me semble peu satisfaisante, littérairement parlant. Il faudra attendre d’autres textes pour connaître son véritable potentiel d’écrivain. [RB]

  • Source : L'ASFFQ 1987, Le Passeur, p. 82-83.