À propos de cette édition

Éditeur
GGC
Titre et numéro de la collection
Premier roman
Genre
Fantastique
Longueur
Roman
Format
Livre
Pagination
227
Lieu
Sherbrooke
Année de parution
1998
ISBN
9782894440698
Support
Papier

Résumé/Sommaire

C’est la première du nouveau film de Cliff Anderson, Vortex. Sont aussi présents les jeunes premiers du film, Matt Connery et Ann-Sue Templer. À la dernière minute, Connery invite une fan, Katie Turner, à se joindre à lui pour la représentation. Dès le départ, tout va mal. Aux yeux du réalisateur, les scènes du film se succèdent dans le désordre. Des sangles (réelles ou irréelles) apparaissent et attachent les spectateurs à leurs sièges. Soudain un homme bondit dans la salle en hurlant qu’on veut tous les rendre fous puis se précipite à travers l’écran. Et tout bascule.

Le film se déroule, montrant Dan Foster (le personnage joué par Connery), psychopathe et obsédé sexuel, amenant Judith Moore (le personnage d’Ann-Sue Templer) dans les toilettes d’un restaurant pour une séance de jambes en l’air. Matt Connery se retrouve devant un urinoir et réalise qu’il est à l’intérieur du film quand il assiste à la scène de sexe qu’il a tournée avec Ann-Sue Templer. Confrontant leur identité respective, l’acteur et le personnage se rendent compte qu’ils ont la même : Dan Foster. Sous le choc de cette révélation, Matt Connery tombe à la renverse et s’évanouit. Son corps disparaît presque aussitôt. Paniquée, Judith Moore quitte le restaurant pour tomber dans le vide. Elle se retrouve dans un lac aux eaux sombres.

Pendant ce temps, toujours dans la salle de cinéma, Cliff Anderson observe, stupéfait, les nouvelles scènes qui viennent d’apparaître dans son film. Pour sa part, Katie Turner se retrouve elle aussi dans le lac aux eaux sombres et rencontre Judith, croyant qu’il s’agit d’Ann-Sue. C’est alors qu’elle révèle qu’elle a été engagée par la Hollywood Corporation pour créer des événements étranges tout au long de la représentation, l’idée étant de filmer le tout pour le présenter à une émission de comédie. Un peu plus tard, Anderson découvre Bob, l’homme qui avait traversé l’écran au début de la représentation. Celui-ci, à son tour, affirme qu’il travaille pour la Hollywood Corporation.

Dès lors, chacun des personnages fictifs et des personnages réels suivra sa voie. Matt Connery tentera par tous les moyens de remettre le film sur ses rails pour le rendre conforme à l’original. Pendant la suite des événements, il rencontre Katie et ils décident d’unir leurs efforts, l’amour naissant n’étant pas étranger à cette collaboration. Anderson, pour sa part, bascule dans une série d’univers délirants. Il se retrouvera successivement dans une cage d’ascenseur au beau milieu du ciel, puis emporté par un pélican géant, puis à bord d’un avion de ligne qu’il ne sait piloter, puis dans une pizza, etc. Dan, le psychopathe, poursuit ses tentatives de coucher avec Judith pour ensuite l’occire. Bob se retrouve au fond d’un gigantesque aquarium et semble pouvoir respirer de l’eau. Il passe ensuite à travers un arc-en-ciel puis revient à son point de départ après avoir considérablement vieilli. Traversant de nouveau l’arc-en-ciel, il arrive dans un immense champ de marijuana et découvre l’Auteur qui lui confie un secret. L’Auteur ajoute qu’il n’a pas l’intention de le révéler tout de suite au lecteur. Pendant ce temps, Ann-Sue, dans la peau de Judith Moore, perd conscience de son identité réelle quand Dan l’hypnotise. Judith Moore, elle, trouvera la mort un peu après avoir fait irruption dans le monde réel.

Finalement, tous, personnages de film et personnages réels se retrouvent à la maison de l’Auteur. Bob explique qu’ils sont dans un livre et non un film. (C’était le secret que lui avait confié l’Auteur.) Pour se tirer de ce cauchemar, ils doivent forcer l’Auteur à écrire pour eux une fin heureuse. L’Auteur accepte de donner à chacun la fin qu’il préfère. Chacun y va de ses désirs les plus profonds. Tous disparaissent, à l’exception de Katie qui demeure avec l’Auteur. Elle lui révèle alors qu’il est le fruit de son imagination.

Katie se retrouve dans la salle de cinéma. Le film s’achève. À l’écran, l’Auteur affirme qu’il n’est pas l’auteur véritable du roman. Un jeune homme aux cheveux mauves apparaît à son tour sur l’écran, assis devant son ordinateur et pianotant sur son clavier. Et il a sa propre idée de la fin. La fin la plus noire possible pour le lecteur de Vortex : dérapage mental… Il fait mourir chacun à tour de rôle sous le couperet de la guillotine. Puis, une fois ces scènes projetées, c’est au tour de l’écrivain de mettre le feu à ses vêtements.

Commentaires

Dans le texte de présentation de l’auteur, on peut lire ceci : « Sa perception sombre et excentrique de la vie génère son inspiration, aspirant le lecteur vers les confins des affres de l’insolite. » Pour avoir lu Vortex… à deux reprises, je peux affirmer avoir connu bien des affres à sa lecture, mais pas nécessairement celles que voulait me faire vivre son auteur.

Premier roman de David Charbonneau, Vortex : dérapage mental a tous les défauts d’un premier roman et bien d’autres. C’est à se demander s’il y a eu direction littéraire – j’espère que non ! Le résumé ne donne qu’une vague idée du roman et de ses infinies ramifications. En réalité, le tout est présenté sous la forme d’une multitude de courtes scènes. La confusion de lecture, voulue jusqu’à un certain point par l’auteur, se trouve multipliée par un découpage à l’emporte-pièce, par des digressions souvent sans queue ni tête, par des changements de point de vue parfois à l’intérieur du même paragraphe, sans parler des événements eux-mêmes. L’esprit est constamment arrêté par la phrase balourde, la comparaison ridicule, le commentaire inapproprié, la mauvaise blague ou le simple galimatias.

Finalement, quand on a compris que l’explication finale aurait pu produire n’importe quelle intrigue, le maigre intérêt qu’on pouvait encore porter au roman s’évanouit tout à fait. Difficile d’être surpris, en effet, quand on vous sert, comme récompense à une lecture ardue, la tarte à la crème par excellence de la littérature : nos protagonistes sont tous les personnages d’un roman.

L’auteur ignore les pièges du participe présent : « La peau tendre de ses longues cuisses […] l’affolait, ne sachant plus où donner de la tête. » « Ses mains glissaient le long de son corps […] réalisant qu’elle ne portait pas de sous-vêtements. » Les superellipses égayent parfois la lecture : « Nous pourrions faire connaissance, se surprit-il à faire les premiers pas. » Et que dire de la perspicacité de ce commentaire : « Anderson tombait en chute libre. Sauf qu’il avait oublié un détail : emporter un parachute. »

On a parfois l’impression que l’auteur n’a tout simplement aucune idée de ce qu’il écrit : « La mort était un phénomène effrayant, pour la plupart des gens, mais face à l’incertitude de la vie, à l’incohérence d’une mort, et à une suite temporelle illogique de ces deux éléments réunis pour détruire toute rationalité et toute sanité (sic) d’esprit, ce qui se produisait ce soir-là avait de quoi faire chavirer les principes de tout homme croyant posséder la raison. »

Triste à dire, mais plusieurs pages de Vortex… conviendraient parfaitement à un exercice de maltraitement de texte. Tout cela pour dire qu’on ne manquera pas de sourire quand on découvrira ces quelques lignes, où l’auteur parle candidement de lui-même. (Une corneille sur une branche d’arbre lit un livre intitulé Vortex : dérapage mental) : « La corneille y était littéralement accrochée, doucement guidée par l’habileté de l’auteur à l’embarquer au cœur de l’histoire, par sa facilité à décrire les décors, et par sa modestie palpable dans son style d’écriture. » Comme modestie, on fait mieux.

Je reconnaîtrai tout de même à l’auteur un certain sens de l’invention, mais celui-ci est trop peu domestiqué et trop mal servi par le style pour s’imposer réellement. L’auteur n’a que 21 ans. Cela n’excuse rien, bien sûr, mais permet de comprendre bien des choses. Je ne suis cependant pas prêt à lui jeter la première pierre. En publiant Vortex tel quel, GGC n’a pas fait preuve de professionnalisme et a rendu un fort mauvais service à l’auteur. Dommage. [GS]

  • Source : L'ASFFQ 1998, Alire, p. 59-61.