Élaine Després

Mémoire de maîtrise, Université du Québec à Montréal, 2007, 141 pages.

Résumé
L'acquisition, la gestion et la préservation de nouveaux savoirs apparaissent comme une obsession universelle et intemporelle des sociétés évoluées. Les façons d'y parvenir sont nombreuses et les projets ponctuent la grande histoire de la connaissance. De la célèbre Bibliothèque d'Alexandrie, détruite par les flammes, à l'Encyclopédie de Diderot et d'Alembert, symbole de l'idéal rationaliste des Lumières, l'ambition et la démesure de ces entreprises enflamment l'imagination du publIc et des créateurs. À l'origine de l'encyclopédisme se trouvent la pulsion de conservation et la crainte de la perte qui motivent un désir de complétude, de totalité : le savoir absolu. Mais la totalité peut également être terrifiante : comment s'y retrouver ? Ces questions ont inspiré de nombreux auteurs de tous les pays, de tous les genres littéraires, de tous les statuts institutionnels et les ont poussés à s'interroger davantage sur la place du savoir dans la société et dans l'imaginaire. Si l'encyclopédie tente de refléter le monde, les encyclopédies imaginaires en promettent d'autres.

Dans le cadre de ce mémoire, certaines œuvres d'auteurs très différents sont analysées dans cette perspective encyclopédique de totalisation des savoirs (concept qui inclut celui de bibliothèque totale). Il s'agit de deux nouvelles de l'auteur argentin Jorge Luis Borges, « Tlön Uqbar Orbis Tertius » et « La Bibliothèque de Babel »; le roman Foundation de l'auteur américain d'origine nusse Isaac Asimov ; et finalement, Les Fourmis, écrit par l'auteur français contemporain Bernard Werber.

Différentes approches théoriques sont utilisées selon les fonctions du discours encyclopédique dans la fiction littéraire : thématique, narrative, discursive, sémiotique. Pour ce faire, les théories épistémocritlques telles que développées notamment par Michel Pierssens (Le Savoir à l'œuvre) et Jean-Francois Chassay (Imaginer la science) servent à l'analyse des savoirs et de leur effet sur les textes. Les théories sémiotiques de la lecture d'Umberto Eco concernant l'encyclopédie de référence du Lecteur modèle (Lector in fabula), ainsi que celles développées par Richard Saint-Gelais à propos du concept de xénoencyclopédie (L'Empire du pseudo) qui permet la lisibilité des textes de science-fiction, sont également essentielles à l'analyse de l'encyclopédie imaginaire en tant que stratégies discursives didactiques.

Table des matières
Résumé v
INTRODUCTION 1

CHAPITRE 1 : BIBLIOTHÈQUES TOTALES ET ENCYCLOPÉDIES : QUELQUES NOTIONS HISTORIQUES ET THÉORIQUES 10
1.1 Historique de la gesion des savoirs 11
1.2 Notions théoriques sur l'encyclopédisme et le discours encyclopédique 30

CHAPITRE 2 : LE FANTASME DU SAVOIR TOTAL ET LES ENCYCLOPÉDIES FICTIVES 41
2.1 L'angoisse de la perte ou de l'accumulation 42
2.2 Les encyclopédistes 49
2.3 L'aventure utopique de l'encyclopédisme 58
2.4 L'échec du projet 67

CHAPITRE 3 : L'ENCYCLOPÉDIE FICTIVE : INTERFACE ENTRE SAVOIR ET FICTION 76
3.1 Quelques fondements théoriques 77
3.2 Les mathématiques de « La Bibliothèque de Babel » 81
3.3 La linguistique dans « Tlön Uqbar Orbis Tertius » 89
3.4 La psychohistoire, une science multidisciplinaire 92
3.5 Les Fourmis : entomologie et éthologie 101
3.6 La science empirique et le savoir livresque 104

CHAPITRE 4 : LA XÉNOENCYCLOPÉDIE : FAIRE CROIRE À UN MONDE IMAGINAIRE 107
4.1 La problématique de la lecture des textes imaginaires 108
4.2 Découvrir un monde par-dessus l'épaule d'un personnage 114
4.3 Humains et fourmis : deux mondes parallèles (fictifs ?) 121
4.4 Le lecteur perdu dans le labyrinthe 128

CONCLUSION 134
Bibliographie 137