À propos de cette édition

Éditeur
Québec/Amérique
Titre et numéro de la collection
Clip - 17
Genre
SFF
Longueur
Collectif
Format
Livre
Pagination
129
Lieu
Boucherville
Année de parution
1994
ISBN
9782890376793
Support
Papier
Illustration
France Brassard

Résumé/Sommaire

[3 FY ; 1 FA ; 1 SF]
Tant pis pour la fée, de Christiane Duchesne
Les Radis de la colère, de Francine Pelletier
Nous étions si trouillards, de Josée Plourde
Le Marchand de rêves, de Carmen Marois
La Louïne, d'Élisabeth Vonarburg

Commentaires

Recueil sur le thème de l’Halloween, Le Bal des ombres rassemble cinq récits destinés à un public de jeunes lecteurs, écrits par autant d’auteures québécoises aux parcours littéraires divers : Christiane Duchesne, Francine Pelletier, Josée Plourde, Carmen Marois, Élisabeth Vonarburg.

De toute évidence, la directrice du collectif, Carmen Marois, n’avait donné aucune consigne sur le genre des textes : Christiane Duchesne part le bal avec un conte de fées traditionnel, mais en négatif, où la sorcière défend le Bien tandis que la fée joue la Méchante. Francine Pelletier nous propose ensuite un fantastique plus moderne, mais édulcoré pour enfants, où se côtoient dans une maison hantée un privé qui jacte série noire, un spectre modèle réduit et un lutin dresseur de légumes. Josée Plourde vise un public plus jeune encore avec son mythe des origines où elle explique pourquoi on cultive les citrouilles et pourquoi on en fait des têtes horrifiques à l’Halloween. Pratiquant l’allégorie, Carmen Marois enchaîne avec des thèmes comme la puissance des rêves et la magie de l’inutile : une ville et ses habitants revivent grâce à l’influence qu’exerce une vieille femme à l’allure de sorcière. Élisabeth Vonarburg clôt le recueil avec une nouvelle de SF typique de sa manière et de son écriture : elle met en scène un groupe de tout jeunes enfants gagnés par l’excitation des préparatifs en vue de la fête de la « Louïne » au cours de laquelle seront séparés les Métamorphes – ceux qui peuvent se transformer en autre chose que des humains – des Immuables – ceux qui ne le peuvent pas.

Pour le reste, il semble que Carmen Marois se soit bien fait comprendre de ses collaboratrices : les textes participent d’un même esprit en renouvelant le thème de l’Halloween sans cependant tout remettre en question. Ils nourrissent une nouvelle vision du thème, ils procurent un nouvel angle de lecture et de perception sans rien détruire, sans rien renier.

Une autre constante se dégage des cinq textes, c’est le travail sur la langue : les participantes exploitent la langue comme outil, bien sûr, mais aussi comme carburant narratif, qu’il s’agisse de la moduler à l’intention d’un profil jeune lecteur comme Christiane Duchesne, d’adopter la manière Donald Westlake en traduction argotique pour raconter une histoire de fantômes (Francine Pelletier), d’emprunter une expression poétique, comme Josée Plourde, dans le but d’exciter l’imagination des lecteurs ou de donner la parole à de tout jeunes enfants (Élisabeth Vonarburg).

Autre fait amusant, l’ensemble des textes contribue, sans qu’il ne paraisse y avoir eu concertation, à une réhabilitation de l’image de la sorcière. Aucune auteure en effet ne défend la vision habituelle de la sombre et méchante prédatrice de bambins. Au contraire, la sorcière fait la promotion des valeurs et de la vision du monde les plus largement répandues et les plus proches de la normale dans la nouvelle de Duchesne. C’est aussi celle qui, débordante de compassion et de générosité, sacrifie sa beauté pour que cessent les sévices à l’encontre des citrouilles (Josée Plourde). C’est encore celle qui fait revenir la couleur, la joie et la vitalité dans la ville grise qui achevait de s’éteindre dans ses cendres (Carmen Marois).

Au final, le texte qui tranche le plus par rapport aux autres, c’est celui d’Élisabeth Vonarburg : pas de sorcières ni de citrouilles, pas de fées, ni fantômes, ni morts-vivants. Elle est la seule en effet à donner dans la SF, et de la vonarburgienne qui plus est. Ces différences assumées, elle propose un texte d’un excellent niveau, que je dois confesser avoir préféré aux quatre précédents. Servie par une narration impeccable, son histoire est portée par une batterie de moyens totalement maîtrisés, une remarquable unité de ton et de style, du souffle et un mot de la fin mémorable : « Il a hâte de savoir la suite. » [RG]

  • Source : L'ASFFQ 1994, Alire, p. 122-123.

Références

  • Dupuis, Simon, Solaris 116, p. 40.
  • Madore, Édith, Les 100 livres québécois pour la jeunesse qu'il faut lire, Québec, Nota bene, p. 239-241.
  • Plaisance, Gilbert, Lurelu, vol. 18, n˚ 1, p. 32.
  • Sernine, Daniel, Lurelu, vol. 18, n˚ 2, p. 52.