À propos de cette édition

Éditeur
JCL
Genre
Hybride
Longueur
Recueil
Format
Livre
Pagination
280
Lieu
Chicoutimi
Année de parution
1999
ISBN
9782894311851
Support
Papier

Résumé/Sommaire

Commentaires

Si d’aucuns croient trouver dans ce recueil des histoires fantastiques issues des légendes et de la tradition saguenéennes, ils seront déçus. Les onze histoires qui composent l’ouvrage sortent en effet tout droit de l’imagination de l’auteur, qui s’est inspiré des paysages du Saguenay pour créer ses intrigues et ses personnages. Le résultat ? Les nouvelles sont très variées, autant dans le choix des thèmes que dans le traitement qui en est fait, les histoires sont originales, mais elles souffrent malheureusement d’un défaut majeur, dont nous discuterons plus loin.

Précisons tout de suite que toutes les nouvelles du recueil ne sont pas fantastiques. Deux appartiennent au genre science-fictionnel (« Onatchiway » et « L’Étranger de la côte ») tandis que deux autres se situent plutôt du côté du merveilleux (« Comme chiens et chats ») et de l’insolite (« Les Pêcheurs »). Les histoires racontées s’échelonnent des années 1940 aux années 1990, mais elles sont toutes reliées entre elles par la présence systématique de deux personnages, les frères Boudreault, ce qui confère une certaine unité à un recueil constitué de nouvelles qui traitent aussi bien du diable et d’anges que d’univers parallèles, d’extraterrestres et de navires fantômes. Mentionnons aussi qu’un thème revient très souvent dans l’ouvrage, celui du courage dans l’adversité.

Bien que les nouvelles soient indépendantes les unes des autres – si l’on excepte la présence des frères Boudreault –, deux d’entre elles sont étroitement liées et se répondent : « Norton » et « Ray ». Dans la première, une jeune femme, Anne-Marie, est piégée par Norton, qui est en fait le diable, et elle ne cherche plus qu’à mourir ; dans la seconde, cette jeune femme est aidée par Luc Morin, un homme que Norton a aussi tenté de piéger, mais qui a été sauvé à temps par un mécanicien, Ray, qui se trouve en fait à être Dieu. Ces deux nouvelles sont en quelque sorte un clin d’œil aux anciennes légendes québécoises, aux contes traditionnels où le diable apparaît quand une personne ne respecte pas les règles établies par l’Église ou ne pratique plus sa religion.

Dans « Norton » et « Ray », la faute d’Anne-Marie et de Luc, les deux personnages à qui le diable s’est manifesté, est de ne plus croire en Dieu. Il s’agit toutefois d’un simple clin d’œil puisque le Satan et le Dieu qui apparaissent dans les histoires de Marc Boileau ne ressemblent en rien à ceux que l’on retrouve dans les contes du XIXe siècle : ils possèdent un parler bien québécois et des idées pour le moins modernes. Ray (Dieu) trouve la Bible trop compliquée et dit que si c’était lui qui l’avait écrite, il y aurait mis des dessins et un peu d’humour, il dit que réciter des chapelets n’est pas nécessaire, il raffole des hot-dogs, des hamburgers et des pizzas. C’est également un grand farceur qui adore se moquer du diable. Norton (Satan), quant à lui, est un peu ridicule : il échoue pratiquement tout ce qu’il entreprend et il se fait toujours avoir par les tours que Dieu lui joue.

Malgré le côté humoristique des deux nouvelles, on sent la présence d’une certaine morale : même quand de dures épreuves nous font douter de l’existence de Dieu, il faut continuer à croire car Il existe vraiment, est aux côtés de chacun de nous et nous aidera tôt ou tard. Quant au diable, il ne s’attaque qu’aux gens qui doutent et qui réévaluent leur foi. Fait à noter, ce sont toutes là des paroles qui sortent de la bouche de Ray. Le moins que l’on puisse dire, c’est que le message ne brille pas par sa subtilité.

Une remarque également en ce qui concerne la langue. En situant ses histoires au Saguenay, l’auteur a voulu donner au parler de ses personnages une couleur locale. Toutefois, le succès de son entreprise est inégal. Dans certaines nouvelles, et particulièrement dans « À la dérive », la langue colle aux personnages et nous transporte directement dans l’univers saguenéen ; dans d’autres histoires, Boileau a trop forcé la note : des personnages qui parlaient très bien au début de la nouvelle se mettent tout à coup à avoir un accent très prononcé ce qui, en plus de saper leur vraisemblance et leur crédibilité, est très agaçant. Il en va ainsi du personnage de Marie Bernier dans « Le Mystère Salomon » et de celui d’Alma Tremblay dans « Onatchiway ». Il ne s’agit toutefois pas là du défaut majeur du recueil. En effet, la principale faiblesse des Histoires fantastiques du Saguenay, et elle est de taille, réside dans le fait que les nouvelles ne frappent pas l’imagination, l’auteur ne parvenant pas à créer, à installer le climat de mystère nécessaire. Cela ne pardonne pas quand on prétend raconter des histoires fantastiques. Boileau a de l’imagination, beaucoup même, il y a une belle variété dans ses histoires ; toutefois, si nous avons un conseil à lui donner, c’est de travailler davantage au plan de l’écriture, d’affiner ses techniques, s’il veut que ses lecteurs profitent pleinement de sa créativité. [SN]

  • Source : L'ASFFQ 1999, Alire, p. 26-30.

Références

  • Boivin, Aurélien, Québec français 118, p. 9.
  • Paré, Yvon, Lettres québécoises 103, p. 36.