Avant l’avènement des nouvelles technologies et l’utilisation des ordinateurs domestiques, produire un fanzine représentait une énorme tâche découpée en plusieurs étapes : transcrire les textes à la machine à écrire, corriger les épreuves, coller les galées sur des feuilles de montage, réduire ou agrandir les images, photocopier, assembler les pages… Aujourd’hui, le travail des fanéditeurs est grandement simplifié par les logiciels de mise en page et de prépresse.

On aura compris que publier quarante-cinq numéros d’un fanzine, de 1984 à 1988, constitue une entreprise héroïque, surtout quand elle repose presque uniquement sur les épaules d’une seule personne. C’est pourtant ce qu’a réalisé Pierre Lacroix, fondateur et éditeur du mythique fanzine Carfax. Cette publication, artisanale dans tous les sens du terme et qui a représenté à l’époque une troisième voie entre les revues Solaris et imagine…, a accueilli les premiers textes d’un grand nombre d’auteurs dont certains ont fait leur marque depuis. Sous-titré « les univers de l’étrange », Carfax se spécialisait dans le fantastique et l’horreur et a détenu pendant plusieurs années le record de longévité pour ce qui est du nombre de livraisons.

En raison de sa périodicité – un numéro par mois, à un certain moment –, Carfax était le meilleur outil d’information du fandom québécois. Homme à tout faire du fanzine, Pierre Lacroix ne se gênait pas pour mettre ses confrères au défi, « brasser la cage » et exprimer haut et fort ses opinions sur le milieu SF & F et l’institution littéraire. Ces coups de gueule n’étaient cependant jamais dictés par son intérêt personnel, mais par une volonté de défendre un genre littéraire qu’il affectionnait particulièrement.

Bien qu’il ait écrit une dizaine de nouvelles, seul ou en collaboration, c’est en tant qu’éditeur et illustrateur que Pierre Lacroix a marqué l’histoire encore jeune de la science-fiction et du fantastique au Québec. Outre Carfax, il a multiplié les initiatives et les compilations, a fait œuvre d’archiviste en recueillant des articles de presse sur les activités du milieu, a édité une foule de brochures et de plaquettes : la collection Carfax-bis, Chat noirLes MotsInfosLes Imagiers…Comme illustrateur, il a fourni un grand nombre de dessins pour les revues spécialisées et illustré les couvertures de ses propres productions.

Pierre Lacroix, de son vrai nom Jean-Claude Djada, alias Gypsy Loup, a définitivement tourné la page sur cette période de « missionnariat » et d’effervescence créatrice. Retiré à Château-Salins, dans la Moselle, il a troqué les crayons et les pinceaux pour la guitare et adopté le mode de vie rural. À croire qu’il a réussi sa métamorphose, comme tant de créatures fantastiques qu’il a dessinées !

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