On chercherait en vain dans les lettres québécoises une production fantastique abondante chez les écrivains du XIXe siècle. Celui qui revendique le plus grand nombre de contes fantastiques est un écrivain qui se considérait avant tout comme un poète et qui vouait une grande admiration à Victor Hugo, son mentor. Louis Fréchette a publié quatorze contes fantastiques, mais on pourrait croire que sa bibliographie en compte le double car il avait l’habitude de changer le titre de ses récits quand ils étaient réédités. Ainsi, « Le Sorcier de Saint-Ferdinand » est devenu « La Maison hantée » quatre ans plus tard, « Le Money musk » a été repris sous le titre de « Les Marionnettes » et ainsi de suite.

Grandiloquent et sentencieux dans sa poésie, Louis Fréchette adopte une approche populiste dans ses contes, convaincu que ce ne sont pas ces récits populaires, au ton léger et parfois humoristique, qui vont assurer sa pérennité littéraire mais plutôt ses vers d’inspiration romantique et épique tels qu’on peut les lire dans La Légende d’un peuple. Fréchette s’est royalement trompé sous ce rapport !

Sa notoriété comme écrivain doit beaucoup au personnage de Jos Violon, figure désormais indissociable de son œuvre. Voilà un conteur sympathique, engageant, qui a du bagout mais qui ne cherche pas à convaincre à tout prix ses auditeurs, de sorte que certains de ses contes cultivent le doute et l’indécision sur la véracité des faits rapportés. Si bien que tous les contes de Jos Violon ne sont pas vraiment fantastiques, peu s’en faut.

Ce Jos Violon est au centre de la galerie de personnages pittoresques que Louis Fréchette fait vivre dans ses contes. Fréchette est un portraitiste, un véritable peintre d’originaux et, parfois, de détraqués, pour reprendre le titre d’un de ses recueils les plus connus ! C’est son sens aigu de l’observation, sa verve intarissable, son refus de se prendre au sérieux qui confèrent à ses personnages une telle dimension humaine qu’ils deviennent des archétypes de la société d’alors.

C’est sans doute pourquoi on lit encore ses contes aujourd’hui, écrits dans une langue savoureuse et familière. Et c’est pourquoi Louis Fréchette est le prince des conteurs du XIXe siècle et celui qui vient spontanément à l’esprit quand on évoque le corpus fantastique de ce siècle.

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